A peine réélu, Cyril Ramaphosa s'attaque à la corruption au sein de l'ANC

Réélu mercredi par le Parlement, le chef de l’Etat sud-africain a montré des premiers signes de son engagement à lutter contre la corruption en Afrique du Sud, discréditée par de nombreux scandales.

Au nombre des députés qui prêtaient serment mercredi devant le président de la Cour constitutionnelle en Afrique du Sud, trois absents de taille : David Mabuza, actuel vice-président du pays, mais aussi Nomvula Mokonyane et Malusi Gigaba, deux anciens ministres. Tous les trois sont des ténors du Congrès national africain (ANC), le parti au pouvoir qui a remporté les législatives avec 57,5 % des voix.

Le chef de l’Etat Cyril Ramaphosa qui a été réélu par le Parlement au cours de la même cérémonie, a décidé que l’investiture des trois membres de son parti devait être retardée en raison d’accusations de corruption qui pèsent sur eux. David Mabuza a notamment été épinglé par un rapport de la Commission intégrité de l’ANC. Et selon cet organe, tout responsable du parti suspecté d’acte répréhensible doit quitter son poste durant les procédures disciplinaires.

Quant aux ministres Mokonyane et Gigaba, ils sont cités par les lanceurs d’alertes dans des cas de corruption qui ont émaillé le mandat de l’ancien président Jacob Zuma.

“Nous aurons un gouvernement qui sera responsable”, a promis le président Ramaphosa alors qu’il acceptait son élection au Parlement. “Nous avons la grande responsabilité de rendre des comptes à la population du pays”, a-t-il poursuivi.

Depuis quelques années, l’ANC — au pouvoir depuis la fin du régime de l’apartheid en 1994 — est passé à la postérité pour les nombreux scandales de corruption qui lui sont imputés. Cette image de parti corrompu s’est davantage renforcée sous le règne du président Zuma. La question a meublé la récente campagne électorale durant laquelle tous les partis se sont engagés à éradiquer ce fléau.

“Les gens ont voté pour le changement, et le changement est ce que vous allez voir”, a lancé Cyril Ramaphosa qui s’est dit prêt à prendre des “décisions difficiles”.

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Jeu de clans

Si le président sud-africain veut travailler à polir une image “d’intégrité” à son parti, il doit toutefois jouer les équilibristes s’il ne veut pas se faire prendre au piège d’une politique souvent trouble au sein de l’ANC, prévient l’analyste politique et chercheur à l’université de Western Cape, Ralph Mathekga.

“Il doit faire attention à ne pas laisser de côté des alliés potentiels comme Mabuza, qui pourraient être de puissants alliés pour lui contre une faction qui lui est opposée dans la politique des clans de l’ANC”, a expliqué le chercheur à l’Associated Press.

Les décennies 2000 et 2010 ont bien illustré l’instabilité et la guerre des clans au sein du parti historique. En 2008, l’ancien président Thabo Mbeki était sacrifié à l’autel des réprimandes des partisans de Jacob Zuma qui l’accusaient de “persécuter” leur champion, visé à cette époque déjà par de nombreuses inculpations.

En 2018, bis repetita. Même scénario, mais avec des acteurs différents. Jacob Zuma, jadis acclamé au sein du parti est accusé de tâcher l’intégrité du parti de Nelson Mandela avec les accusations de corruption dont il fait l’objet. Poussé vers la sortie, il a été remplacé par son vice-président Cyril Ramaphosa en février 2018, à quelques mois de la fin de son mandat.

Les élections générales de début mai ont donné une nouvelle chance à l’ANC se racheter une probité. Mais selon les analystes politiques, si le président Ramaphosa ne parvient pas à respecter ses engagements, l’ANC pourrait bien perdre la main à la prochaine échéance électorale.

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