Si le Zimbabwe peut se féliciter d’avoir mis fin (à temps) aux contestations contre la récente hausse des prix du carburant, la répression sanglante et de nombreuses arrestations font penser à la politique répressive du temps de Robert Mugabe.
Zimbabwe : retour au calme ou à l'anormale ?
Un Zimbabwe au bord du chaos. La faute aux manifestations lancées lundi dernier à Harare et Bulawayo par la Confédération syndicale du Zimbabwe (ZCTU). La principale centrale syndicale du pays protestait contre la hausse des prix du carburant.
En vendant par exemple l’essence à 3,31 dollars le litre, le Zimbabwe devient le pays où le prix du carburant est le plus élevé au monde, d’après le site GlobalPterolPrices. Pour le Chef de l‘État Emmerson Mnangagwa, il s’agit d’apporter des solutions à « la pénurie persistante de carburant due à la hausse de la consommation dans l‘économie et aux activités illégales liées aux taux de change et au commerce (de pétrole) ».
Un argument qui n’a pas du tout satisfait son peuple, notamment les syndicalistes. « On ne peut pas payer tous les jours 3 dollars pour une course en taxi », confiait lundi à l’AFP, Mulungisi Tshabalala, un habitant de Bulawayo. « On est fatigué de Mnangagwa (…) il doit partir ».
En réponse aux manifestations, une brutale répression qui aura fait en trois jours, trois morts selon le gouvernement. Pour des ONG de défense des droits de l’homme, c’est plus que le triple du chiffre avancé par les autorités. Sans compter les quelque 70 blessés par balles et les 600 arrestations reconnues par le ministère de l’Intérieur. Parmi les personnes arrêtées, le pasteur et opposant Evan Mawarire qui a comparu devant la justice pour « activités subversives ».
« Usage excessif de la force »
Du côté des institutions internationales l’heure est aux condamnations et aux recommandations. Le cas de l’ONU qui a dénoncé vendredi un « usage excessif de la force » et recommandé au régime de Mnangagwa de « mettre fin à la répression », de libérer les prisonniers et de mener des enquêtes « indépendantes » pour tirer au clair ces violences qui ont endeuillé des Zimbabwéens.
Ce peuple qui, durant le règne sans partage de Robert Mugabe (1987-2017), était constamment et copieusement broyé et muselé par une machine répressive soigneusement conçue et pilotée par des hommes à poigne dont Emmerson Mnangagwa, ancien ministre de la sécurité.
La récente répression et celles liées à la présidentielle de juillet 2018 constituent la preuve que le système répressif n’a pas changé. Les quelque 14 millions de Zimbabwéens devront continuer de broyer du noir du fait d’une chronique crise économique liée en partie à la sempiternelle inflation causée par l’absence des liquidités.
Dès lors, au moment où Harare fait valoir un retour au calme après la grogne sociale de ces trois derniers jours, la situation socioéconomique et sociopolitique demeure intenable ou anormale. Et jusqu‘à quand ? Peut-être quand le navire aura accosté au « nouveau Zimbabwe » promis en juillet dernier par l’homme fort de Harare.
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