Les dirigeants de l’opposition en République démocratique du Congo (RDC) ont appelé le nouveau gouvernement à faire la lumière sur un rapport de l’agence de presse Reuters qui révélait que la majorité des fonds versés par les Congolais pour le passeport biométrique était reversée à des sociétés offshores à l‘étranger.
RDC - Affaire passeports biométriques : une enquête exigée, le gouvernement donne sa version
Lundi, face à des journalistes, Félix Tshisékedi, président du Rassemblement, principale coalition de l’opposition, a clairement indexé le Premier ministre Bruno Tshibala à qui il lance le défi de prendre des mesures adéquates concernant l’affaire du passeport.
“Il devrait commencer par résoudre le problème du scandale qui se déroule aujourd’hui dans la République – le scandale des passeports”, a déclaré Tshisekedi. “Tshibala devrait montrer son indépendance en résolvant ce problème et nous parlerons”.
Claudel Andre Lubaya, député de l’opposition et ancien gouverneur de la province, a également demandé au procureur général d’enquêter sur la question. Quant au mouvement citoyen Lucha, il a déclaré sur son compte Twitter que la RDV est prise “en otage par une bande de voleurs et de criminels”.
“Il n’y a ni famille politique ni famille biologique qui s’intéresse à cela”
Dans une enquête publiée la semaine dernière, Reuters avait révélé comment étaient repartis les 185 dollars que paie un Congolais pour s’offrir un passeport biométrique.
Selon des documents consultés par l’agence relatifs notamment à l’accord conclu en 2015 entre le gouvernement kinois et une société belge appelée Semlex, 60 dollars vont à Semlex et 60 autres dollars sont versés à une petite entreprise appelée LRPS aux Émirats arabes unis ; tandis que le gouvernement congolais ne touche que 65 dollars sur les 185 dollars.
A en croire une personne ayant une connaissance directe de l’affaire du passeport en RDC, la société enregistrée par les Émirats arabes unis appartient à Makie Makolo Wangoi, considérée comme un proche parent du président Joseph Kabila.
Dans une interview télévisée sur Tele 50, le vice-ministre des Affaires étrangères Yves Kisombe a confirmé que le Trésor reçoit 65 $ par passeport alors qu’“une entreprise privée” reçoit 120 $, mais a nié toute irrégularité.
“Il n’y a pas d’individu, ni de famille biologique, ni de famille politique, ni de personne influente, quel que soit l’entourage qui s’intéresse à cela”, a-t-il déclaré.
Les questions de corruption sont récurrentes dans ce vaste État de l’Afrique centrale. En 2013, un rapport de l’Africa Progress Panel révélait que le pays a perdu près de 1,3 milliard de dollars de recettes dans cinq contrats miniers depuis 2010. Un conseiller du président Kabila sur le blanchiment d’argent affirmait par ailleurs en 2015 que la RDC perdait jusqu‘à 15 milliards de dollars par année en cas de fraude, soit près de trois fois le budget annuel du pays.