Ouverture ce samedi, à Abidjan, de la campagne en vue des législatives ivoiriennes. Ces élections ne comptent pas moins de 1.337 candidats dans les starting-blocks, pour un vote à tour unique. En d’autres termes, sera élu le candidat qui sera en tête dans sa zone. Mais ces législatives s’annoncent très animées, avec la participation de l’opposition et de certains dissidents du RHDP, la coalition présidentielle.
Ouverture de la campagne en vue des législatives ivoiriennes
Le scrutin s’annonce serré et pour cause : Alassane Ouattara, le présidient ivoirien, doit se frotter à des dissidents issus de son propre camp. Le numéro un ivoirien dit malgré tout viser “une forte majorité au Parlement”, pour ces législatives dont le jour du vote est fixé au 18 décembre prochain.
Environ 30.000 membres des forces de sécurité seront déployés pour ce scrutin, qui se prépare sur fond de tension accrue. En effet, des violences ont été enregistrées ces derniers mois, avec des commissariats attaqués, et même, des gendarmes lynchés.
Quand Alassane Ouattara brandit la thèse du bilan économique
Pour revenir à Alassane Ouattara, le RHDP (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix, coalition présidentielle) veut la majorité des 225 sièges à pourvoir à l’hémicycle.
“Donnez-moi une forte majorité pour me permettre d’accélérer les travaux que j’ai comme objectif pour les quatre années à venir”, avait lancé le chef de l’exécutif ivoirien, se vantant au passage de son bilan économique.
A ce propos, des observateurs lui reconnaissent des mérites économiques, mais regardent d’un mauvais œil son bilan politique. Celui-ci tourne particulièrement autour d’une réconciliation nationale au plus mal, avec des prisonniers politiques en détention, notamment ceux proches du camp de son ancien rival Laurent Gbagbo (lui-même détenu à la CPI, au Pays-Bas).
Ajouté à cela, une justice fortement critiquée qui selon certains, fait la part belle au camp des ex-rebelles, qui ont pourtant eux-aussi commis des crimes durant la longue crise armée qui a déchiré la Côte d’Ivoire, de 2002 à 2011.
Pour clore le chapitre (non-exhaustif) des reproches faits au bilan politique d’ADO (les initiales du président ivoirien), l’adoption fin octobre de la nouvelle Constitution, fortement contestée par l’opposition. Pour rappel, cette nouvelle loi fondamentale avait été adoptée au travers d’un référendum qui avait enregistré un faible taux de participation.
En face, les dissidents et l’opposition affûtent leurs armes
Pour ces législatives, il n’y a bien sûr pas que le camp présidentiel comme candidat. Des ‘‘dissidents’‘ issus du RHDP, veulent bien obtenir leur part du gâteau. Parmi eux, la très médiatisée Yasmina Ouegnin (voir photo), fille de Georges Ouegnin, figure de la vie politique ivoirienne, indéboulonnable chef du protocole de la présidence de 1960 à 2000.
La dissidence de Yasmina Ouégnin est née de son opposition à la nouvelle Constitution. Elle qui était partie pour être candidate pour le compte du PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire, membre du RHDP), s’est vue éjecter de cette candidature et a du coup décidé de prendre son propre chemin.
Yasmina Ouegnin est candidate indépendante et vise la très huppée commune de Cocody. Elle a en face d’elle Affoussiata Bamba-Lamine, ministre de la Communication, membre très engagée du RHDP et considérée comme l’une des ‘‘stars’‘ du gouvernement ivoirien. Ce duel entre femmes, dont l’issue sera symbolique, concentre les regards, la victoire générale ne devant pas échapper au camp Ouattara.
“Il faut savoir pour qui on travaille et surtout pourquoi on travaille. Moi, je travaille pour une Côte d’Ivoire prospère. Je travaille pour une Côte d’Ivoire où tout le monde, quelle que soit sa classe sociale, arrivera à se réaliser à travers des lois justes, à travers des lois équitables, à travers des lois qui fédèrent”, a laissé entendre la fille de Georges Ouegnin, lors de son meeting de campagne à Cocody.
Autre candidat aux législatives, le FPI (Front populaire ivoirien), le parti divisé de l’ex-président Laurent Gbagbo. Le clan des refondateurs compte bien retrouver sa place au sein de l’hémicycle.
La division de ce parti, au pouvoir de 2000 à 2010, est née de la mésentente entre les pros-Aboudramane Sangaré d’une part et les pros-Affi Nguessan, de l’autre. Les premières cités s’opposent à la participation du parti à ces législatives, exigeant, entre autres, la libération de l’ancien président Gbagbo. Tandis que le clan d’en face parle de tourner la page Laurent Gbagbo et d’avancer. “La politique de la chaise vide n’ayant pas porté ses fruits”, selon l’ancien Premier ministre Affi Nguessan.
Issiaka Sangaré, candidat du FPI, fait partie des pros-Affi Nguessan. Pour lui, “oui, il est bien évident que sans le FPI, notre Parlement est forcément déséquilibré. Le jeu institutionnel au nom de la séparation même des pouvoirs qui fonde la démocratie devrait inviter les uns et les autres à souhaiter voir le FPI revenir à l’hémicycle”.
Même son de cloche pour le candidat du même parti, Niamba N’Drin, qui s’exprimait (tout comme Issiaka Sangaré) au cours d’un meeting du FPI, dans le cadre de la campagne pour les législatives. “Il faudrait qu‘à l’Assemblée nationale, il y ait l’opposition, la vraie opposition et de l’autre côté le pouvoir pour que l’Assemblée nationale puisse fonctionner correctement. Et nous partons aux élections pour cela”, a-t-il lâché.
Jusqu‘à présent, et cela depuis 2011, le RDR (Rasemblement des républicains, le parti d’Alassane Ouattara) dispose d’une majorité écrasante à l’Assemblée, l’opposition ayant boycotté les législatives de 2011, à l’issue de la crise postélectorale de 2010-2011. Crise sanglante née de la dispute pour le fauteuil présidentiel entre Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara et qui aurait fait 3.000 morts.
Depuis l’adoption de la Constitution de 2016, les parlementaires auront désormais un mandat de quatre ans, au lieu des cinq ans habituels.