Vêtu d’une tenue traditionelle, la tête coiffée d’un haut de forme, Emere Godwin Okpabi, a quitté sa terre d’Ogale au Nigéria pour assister à une audience devant la Haute Cour de Londres et obtenir justice pour son peuple, le peuple Ogoni.
Nigéria : le roi qui s'oppose à Shell
Sur le banc des accusés la compagnie pétrolière Shell, tenue pour responsable des fuites ayant pollué les terres et les étangs de l’Ogoniland une région du delta du Niger.
Pour ce chef tribal, roi d’Ogale, “Il faut que le tribunal force Shell à agir sur le champ et à appliquer le rapport des Nations Unies. Il est très clair ! Il leur dit : Allez-y ! Donnez leur de l’eau ! Examinez les patients ! Regardez ce que vous avez fait et allez aider ces gens. Tout est écrit en détail et en anglais, pas en dialecte!”.
Pour appuyer ses propos il brandit des bouteilles d’eau, croupie, contaminée au pétrole. Cette eau que son peuple boit et qui le tue à petit feu.
“Il y a des maladies bizarres dans ma communauté. Du jour au lendemain des gens meurent de mort soudaine. Tout d’un coup, d’autres deviennent stériles, ils ne produisent plus de spermatozoides”, s’indigne-t-il. “J’ai les moyens d’acheter de l’eau minérale. Mais pas pour tout le monde”, ajoute-t-il.
Pendant trois jours, les avocats de plus de 40.000 Nigérians vont demander des comptes au géant pétrolier.
Le groupe anglo-néerlandais estime qu’un éventuel procès contre sa filiale nigériane SPDC devrait être organisé au Nigeria où les faits se sont déroulés, et non en Europe.
Mais pour le roi Okpabi, la justice britannique représente le dernier espoir de mettre fin à la pollution qui tue son peuple.
“Shell, c’est le Nigeria, autant que le Nigeria, c’est Shell. Jamais vous n’allez gagner contre Shell devant un tribunal nigérian. La vérité, c’est que le système judiciaire nigérian est miné par la corruption”.
De la justice britannique, le chef tribal attend qu’elle contraigne Shell à accepter les conclusions d’une enquête de l’ONU qui avait pointé en 2011 les ravages de la pollution pétrolière dans l’Ogoniland, la région où vit la communauté Ogale.
En janvier 2015, au terme d’une bataille juridique de trois ans, Shell avait accepté de verser plus de 80 millions de dollars à 15.600 pêcheurs de Bodo, une autre communauté nigériane touchée par deux importantes fuites de pétrole en 2008.