Au Kenya, Safari Martins réinvente la coiffure africaine

Photo prise sur Instagram Safro Chades   -  
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Photo prise sur Instagram Safro Chades

Au bord d’une route rurale de Kiambu, en périphérie de Nairobi, une modeste cabane en bois abrite l’atelier de Safari Martins, l’un des coiffeurs les plus influents du Kenya.

Ici, pas de salon luxueux, mais des murs décorés d’outils insolites : une pelle, un fer à repasser, une cisaille agricole, une clé à molette… Des objets qui, entre ses mains, deviennent des instruments de création capillaire. Sous le pseudonyme Chief Safro, il cumule près d’un million d’abonnés sur Instagram et TikTok, où ses vidéos fascinent par leur originalité.

Chaque coupe est un spectacle. Pendant que Safari Martins sculpte les cheveux de ses clients avec une précision chirurgicale, un assistant filme chaque geste sous tous les angles. Ce qui rend son travail unique, c’est son mélange d’audace et de tradition : il utilise des outils inusités, comme une boîte en fer bénie par les anciens de son village, et intègre des contes africains dans les voix off de ses vidéos. « Je suis motivé par la culture et les histoires africaines, » confie-t-il. « Il faut quelqu’un qui représente notre identité, pas une copie de la culture occidentale. »

Ses clients, comme Ian Njenga, en redemandent. « Son talent est d’un niveau supérieur, » affirme ce dernier, qui a découvert Martins en 2024. « Après une coupe ici, je me sens en confiance, même dans la rue. C’est une expérience unique. » Pour près de 12 dollars (1 500 shillings kényans), bien au-dessus du tarif moyen à Nairobi, les clients paient non seulement une coupe, mais aussi cinq minutes de célébrité sur les réseaux sociaux.

L’essor des barbiers influenceurs au Kenya

Le succès de Safari Martins s’inscrit dans une tendance plus large : l’explosion des réseaux sociaux au Kenya. Entre janvier 2023 et janvier 2025, le nombre d’utilisateurs est passé de 10,6 à 15,1 millions, soit une hausse de près de 50 % (DataReportal). Pour 15 % des Kényans, la création de contenu est même devenue la principale source de revenus (Kenya Institute for Public Policy Research and Analysis, juin 2025).

Pourtant, malgré sa popularité, Martins dénonce un manque de reconnaissance pour les barbiers influenceurs. « On devient viral, mais on n’est pas respecté, » regrette-t-il. « Même avec des vues et de l’engagement, on n’est pas payé comme les autres créateurs. » Selon Fundmates, une société spécialisée dans le financement des influenceurs, les contenus liés aux jeux, à l’éducation ou au lifestyle sont bien plus lucratifs, grâce à des partenariats publicitaires plus faciles à négocier.

Avec son approche audacieuse et son ancrage culturel, Safari Martins incarne une nouvelle génération de créateurs qui réinventent les codes tout en célébrant leur héritage. Son parcours, du lycée rwandais aux réseaux sociaux kényans, prouve qu’innovation et tradition peuvent faire bon ménage et inspirer bien au-delà des frontières.

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