Le roi Charles III a rencontré mercredi des anciens combattants kényans des deux guerres mondiales, au deuxième jour de sa visite dans ce pays d'Afrique de l'Est, où il a condamné la veille les "inexcusables" abus coloniaux britanniques, sans toutefois demander pardon.
Deuxième jour au Kenya pour Charles III, après sa condamnation des abus coloniaux
Cette absence de demande de pardon a été notamment déplorée par la Commission kényane des droits de l'homme (KHRC), une ONG qui avait demandé au roi des "excuses publiques inconditionnelles et sans équivoque".
"Il n'a en aucun cas reconnu les graves préoccupations que nous avons soulevées", a déclaré à l'AFP Martin Mavenjina, en charge des questions de justice à la KHRC, estimant que le discours donné mardi soir par le roi n'avait "rien d'exceptionnel".
Charles III a reconnu que "des actes de violence odieux et injustifiables ont été commis à l'encontre de Kényans alors qu'ils menaient (...) une lutte douloureuse pour l'indépendance et la souveraineté". "Et cela, c'est inexcusable", a affirmé le souverain, âgé de 74 ans.
Il n'a toutefois pas demandé "pardon" pour les violences coloniales, comme l'a fait mercredi le président allemand Frank-Walter Steinmeier lors d'une visite en Tanzanie voisine.
La période de la colonisation britannique du Kenya, entre 1895 et 1963, a notamment été marquée par la brutale répression de la révolte des Mau Mau, l'une des plus sanglantes menées par l'empire britannique qui a fait officiellement plus de 10.000 morts entre 1952 et 1960.
Mardi, Charles avait déposé une gerbe sur la tombe du soldat inconnu dans un jardin érigé sur les lieux d'un camp où étaient détenues les personnes soupçonnées de liens avec les rebelles Mau Mau. C'est là qu'avait été hissé en décembre 1963 le drapeau du Kenya indépendant à la place de "l'Union Jack" britannique.
Médailles
Poursuivant le volet mémoriel de son voyage, le roi s'est rendu mercredi, avec la reine Camilla, dans un cimetière militaire de la capitale Nairobi pour rendre hommage aux Africains morts pour la Grande-Bretagne lors des deux conflits mondiaux.
Le couple a déposé une couronne devant des tombes avant de rencontrer des anciens combattants kényans, certains en fauteuil roulant.
"J'espère que nous pourrons faire quelque chose de spécial pour vous", a déclaré Charles à l'un d'entre eux, lors d'une cérémonie de remise de médailles.
L'un des vétérans, Samweli Mburia, a raconté à l'AFP avoir reçu une médaille sous le régime colonial, mais qu'il s'en était débarrassé parce qu'il "craignait les représailles" de combattants indépendantistes.
"Beaucoup de gens n'étaient pas contents que nous (...) ayions combattu pendant la guerre", a déclaré le vieil homme, qui a servi en Égypte, en Éthiopie et au Myanmar.
Mardi, le président kényan William Ruto a salué "le courage et la volonté" de Charles "de faire la lumière sur des vérités inconfortables" et qui "constituent un premier pas vers "des progrès allant au-delà des demi-mesures timides et équivoques de ces dernières années".
Jusqu'à présent, Londres avait simplement exprimé en 2013 des "regrets sincères" pour les violences coloniales au Kenya.
Cette année-là, après des années de procédure, Londres avait accepté de dédommager plus de 5.000 Kényans victimes d'abus pendant l'insurrection Mau Mau. Après déduction des frais de justice, chacun avait reçu environ 2.600 livres (3.000 euros).
Environnement
Engagé de longue date pour l'environnement, Charles III s'est rendu mercredi dans la forêt de Karura.
Cet écrin de verdure d'un millier d'hectares dans la capitale kényane avait été défendu par sa défunte amie et Prix Nobel de la paix 2004 Wangari Maathai, fondatrice du Mouvement de la Ceinture Verte qui a oeuvré à protéger la biodiversité au Kenya.
Il y a rencontré sa fille Wanjira Mathai, ainsi que la légende kényane du marathon Eliud Kipchoge.
Le couple royal doit quitter Nairobi jeudi pour la ville portuaire de Mombasa (sud), où Charles visitera notamment une réserve naturelle et rencontrera des représentants religieux.