Cannes 2023 : sur la Croisette, nouvelle vague africaine

Khady Mane, Ramata-Toulaye Sy et Mamadou Diallo à la première du film 'Banel et Adama' au 76ème Festival de Cannes France, le 20 mai 2023   -  
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Scott Garfitt/2023 Invision

Avec deux films en compétition, une poignée d'autres disséminés dans les sélections parallèles et deux membres du jury originaires du continent, l'Afrique n'a jamais été aussi présente à Cannes. Une "émulation artistique" portée par une nouvelle génération de cinéastes.

Une deuxième Palme d'or pour ce continent habituellement sous-représenté à Cannes et dans les autres festivals de 7e art ? "La concurrence est très, très rude" , dit à l'AFP la benjamine de la compétition, Ramata-Toulaye Sy , sans se risquer à davantage de commentaires.

Née en France - où elle a grandi - de parents Sénégalais, elle a livré à Cannes un premier long-métrage empreint de lyrisme sur l'émancipation d'une femme peule .

L'autre réalisatrice du continent en lice pour la Palme est la Tunisienne Kaouther Ben Hania , révélée au grand public grâce à son thriller sur une victime d'un viol : "La belle et la meute" , présenté à Cannes en 2017.

Toutes deux peuvent succéder à l'Algérien Mohammed Lakhdar-Hamina , Palme d'or en 1975 avec "Chronique des années de braise" . Il est à ce jour le seul cinéaste africain à avoir reçu la distinction suprême sur la Croisette.

Sénégal , Tunisie , Maroc , Algérie , Cameroun , Soudan ... Les films en provenance d'Afrique sont en pleine lumière.

"On est face à l'arrivée d’une nouvelle génération, mieux formée et qui a des choses à dire" , souligne auprès de l'AFP Kaouther Ben Hania. "Il y a une vraie émulation artistique" , complète le Marocain Kamal Lazraq .

"Les meutes" , son premier long-métrage qui suit la folle nuit au cours de laquelle un père et son fils tentent de se débarrasser du corps d'un homme, a été présenté en Sélection officielle, dans la catégorie Un certain regard .

L'année dernière, sa compatriote Maryam Touzani - membre du jury cette année - livrait un somptueux long-métrage sur le tabou de l'homosexualité dans le royaume chérifien. Un film qui avait été présenté dans la même section.

A la Quinzaine des cinéastes , une autre section parallèle du Festival, le film "Déserts" de Faouzi Bensaïdi , sorte de western contemplatif tourné dans le Rif, n'a laissé personne indifférent.

"Le Maroc fait depuis des années un vrai travail d'accompagnement de la production cinématographique" , assure Kamal Lazraq. Même tonalité chez Ramata-Toulaye Sy, qui a loué l'accompagnement du gouvernement sénégalais concernant son film.

Pour d'autres, le soutien financier et logistique n'est pas toujours au rendez-vous, comme l'avait dit publiquement Kaouther Ben Hania en 2021.

Peut-on parler d'une percée du cinéma africain ? Non, rétorque à l'AFP le cinéaste malien (Carrosse d'or cette année) Souleymane Cissé . "Les films africains ont toujours existé mais n'ont jamais été mis en valeur" , soutient-il.

"La production africaine est riche et variée, il est temps de s'y intéresser" , poursuit-il, dénonçant le "mépris" des Occidentaux. "Ce sont aux distributeurs d'aller chercher les films africains" , abonde Ramata-Toulaye Sy, qui enseigne le cinéma à Dakar. "Ils ont toujours été là, devant nous" , assure-t-elle.

Tous les cinéastes sollicités par l'AFP disent partager la même ambition : faire des films ancrés en Afrique mais à "portée universelle" .

Reste que le chemin est souvent semé d'embûches : "Dans notre région, la culture dérange" , affirme le Soudanais Mohamed Kordofani , pour qui le tournage de son premier long-métrage "Goodbye Julia" (présenté en Sélection officielle) a été "très compliqué" .

"Tourner dans un pays instable, où il y a des manifestations et des émeutes, n'est pas évident. On est vite rattrapé par la réalité de nos pays" .

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