Libéria : une fin de grossesse "en enfer" pour une infirmière atteinte du Covid-19

Sedia Marwolo, une infirmière de Monrovia, vient tout juste d’accoucher de son troisième enfant. Atteinte du coronavirus, elle a vécu une fin de grossesse “en enfer” dans une unité de soins intensifs d’un hôpital de la capitale libérienne. Aujourd’hui guérie, elle fait face à l’hostilité de ses voisins.

Début mai, alors qu’elle était enceinte de 8 mois, son patron l’a renvoyée chez elle, sans explication. Plus tard, une collègue lui dira que son supérieur direct avait été testé positif au coronavirus.

Cinq jours après avoir s‘être soumise à un test de sa propre initiative, revenu positif, l’infirmière de 38 ans a vu une équipe médicale en équipement de protection débarquer chez elle. Sous le regard du voisinage, elle a été séparée des siens et emmenée dans une unité d’un hôpital de Monrovia réservé aux malades de la maladie Covid-19.

“J‘étais comme en enfer, seule, abandonnée. Etre enceinte et se retrouver dans une unité de soins intensifs pour coronavirus, c’est terrible”, a confié à l’AFP Sedia Marwolo.

“Il n’y avait pas de gynécologue, pas de sage-femme, et pas l‘équipement nécessaire pour suivre mon état de santé”, dit-elle.

Effrayée, elle n’a pas mangé pendant deux jours. “Je me suis alors rendu compte que mon bébé ne bougeait plus dans mon ventre”, se souvient-elle.

La jeune femme a trouvé du soutien et du réconfort auprès d’une sage-femme employée par le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), Harriette Mondaye.

“Il y a avait des moments difficiles”, se souvient Harriette Mondaye, selon qui Sedia pleurait à chaque fois qu’elles se parlaient au téléphone.

La jeune infirmière a recommencé à s’alimenter et, après 15 jours, a été déclarée guérie. Elle a pu quitter les soins intensifs et a donné naissance à une petite fille, qui n’a pas été contaminée.

“Nous avons installé une maternité au sein du centre de traitement, en nous assurant que des sages-femmes soient présentes et que Sedia reçoive le suivi nécessaire”, explique le représentant de l’UNFPA au Liberia, le docteur Bannet Ndayanabangi.

Depuis son retour à la maison, la situation ne s’est pas vraiment améliorée. Son mari et un de ses enfants, également contaminés, ont été déclarés guéris eux-aussi. Mais la famille fait face à la stigmatisation du voisinage, “une autre sorte d’enfer pour ceux qui ont eu le virus”, affirme Sedia Marwolo d’une voix faible, les traits tirés, son bébé dormant sur ses genoux.

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“Je ne me sens plus chez moi. Les gens nous dévisagent, appellent notre maison la maison corona ou se mettent à courir quand je sors de chez moi”, raconte-t-elle.

Son mari Moses “remercie Dieu” et se dit néanmoins “très heureux que tout le monde ait pu rentrer à la maison en bonne santé, y compris le bébé”.

Avec 250 cas de coronavirus officiellement confirmés et 24 morts, le Liberia est relativement épargné par rapport à l’Europe, aux Etats-Unis ou à l’Amérique du Sud. Mais il fait partie des pays où l‘état du système sanitaire suscite l’inquiétude face à la pandémie.

Petit pays pauvre d’Afrique de l’Ouest, il reste hanté par des guerres civiles qui ont fait quelque 250.000 morts entre 1989 et 2003 et par l‘épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest (2014-2016), qui avait tué 4.800 personnes dans le pays.

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AFP
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