Le chef de l’Etat comorien sortant, Azali Assoumani, l’a emporté sans surprise dès le premier tour de la présidentielle, avec 60,77% des suffrages, selon des résultats officiels annoncés mardi mais rejetés par l’opposition qui a crié à “un coup d’Etat à travers une élection” entachée de fraudes.
Présidentielle aux Comores : Azali Assoumani réélu dès le premier tour, l'opposition dénonce "un coup d'Etat"
Le colonel Azali Assoumani, au pouvoir depuis 2016, a écrasé son principal adversaire, Mahamoudou Ahamada, du parti Juwa, arrivé en deuxième position avec 14,62% des suffrages, selon les chiffres communiqués par le président de la Commission électorale, Djaza Ahmed Mohamed.
Le camp présidentiel s’est félicité de cette victoire, qui n’a suscité aucun réaction immédiate dans les rues de la capitale, Moroni. “Nous sommes heureux d’avoir gagné au premier tour comme on l’avait annoncé”, a réagi Ali Houmed Msaidié, directeur de campagne du président-candidat.
“Maintenant, nous allons tout faire pour (...) relancer le développement économique, principale préoccupation de la population” de ce petit archipel pauvre de l’océan Indien, a-t-il assuré.
L’opposant Mahamoudou Ahamada a immédiatement “rejeté les résultats”, dénonçant, dans une interview à l’AFP, “un coup d’Etat militaire à travers une élection présidentielle”.
Il a appelé “la communauté internationale à ne jamais reconnaître la réélection d’Azali” entachée, selon lui, de nombreuses fraudes.
L’opposition et la société civile comoriennes ont dressé un bilan accablant du scrutin de dimanche, dénonçant des bureaux saccagés, des urnes bourrées ou confisquées par la gendarmerie et des assesseurs de l’opposition empêchés de faire leur travail…
Avant même l’annonce des résultats, les douze adversaires du chef de l’Etat sortant avaient déjà prévenu qu’ils les considéraient comme nuls et non avenus. “Nous utiliserons tous les moyens civils pour nous débarrasser du pouvoir”, avait promis le colonel Soilihi Mohamed, dit “Campagnard”.
Lundi, la gendarmerie avait dispersé sans ménagement une manifestation de plusieurs candidats au scrutin et d’une centaine de leurs partisans qui défilaient dans les rues de la capitale pour dénoncer un “hold-up” électoral.
L’intervention a fait 12 blessés légers dans les rangs de l’opposition. Le ministre de l’Intérieur, Mohamed Daoudou, dit “Kiki”, a justifié le recours à la force par la nécessité de maintenir l’ordre public.
“Ces gens veulent installer le désordre dans Moroni, il n’est pas question de les laisser faire”, a-t-il tonné auprès de l’AFP.
‘Aucune crédibilité’
“Quels que soient les résultats annoncés, ils n’auront aucune crédibilité”, avait estimé Samir Soulaïmane, de la Plateforme citoyenne, un collectif d’ONG, peu avant l’annonce des résultats.
Le ton est plus diplomatique mais les observateurs de l’Union africaine (UA), du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Comesa) et des Forces en attente de l’Afrique de l’Est (EASF) ont livré le même verdict.
Ils “déplorent les incidents observés qui n’ont pas permis aux électeurs de sortir massivement pour exercer leur droit civique dans la sérénité”, ont-ils écrit, “la situation (...) empêche de se prononcer de façon objective sur la transparence et la crédibilité du scrutin”.
Le camp présidentiel a balayé toutes ces critiques. “Je n’ai jamais vu élections plus transparentes dans notre pays”, a affirmé très sérieusement M. Daoudou, “nous sommes un pays souverain, personne ne viendra nous imposer quoi que ce soit de l‘étranger…”
Tout au long d’une campagne qu’il a écrasée de tous les moyens de l’Etat, Azali Assoumani, 60 ans, avait répété qu’il comptait bien l’emporter dès le premier tour. C’est désormais mission accomplie.
A la tête du pays de 1999 à 2006, réélu en 2016, l’ancien putschiste est accusé depuis des mois de multiplier les coups de force pour s’accrocher au pouvoir.
Il y a un an, il a fait adopter par référendum une réforme constitutionnelle qui a remis en cause le système mis en place en 2002 pour mettre fin aux crises séparatistes qui agitaient le petit archipel de l’océan Indien.
Ce texte a étendu de un à deux mandats de cinq ans la durée de la présidence attribuée par rotation à un natif de chacune de ses îles (Grande-Comore, Mohéli, Anjouan).
Par la grâce du nouveau calendrier électoral, le chef de l’Etat sortant pourrait désormais rester – en cas de victoire lors du scrutin de 2024 – au pouvoir jusqu’en 2029.
L’opposition a dénoncé sa dérive autoritaire, la corruption de son régime et son incapacité à réduire la pauvreté extrême des 800.000 habitants du pays. Mais, divisée et décimée par la répression, elle a disposé de peu de moyens pour contrer la “machine Azali”.
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AFP