Construire des villes viables et durables est d’actualité au Moyen-Orient. Salim Essaid, s’est rendu au “sommet des villes arabes du futur”. Il a découvert que les Emirats Arabes Unis sont en tête de la liste des villes intelligentes pour la région du Moyen Orient Afrique du Nord (MENA). Aider les villes modernes à trouver des modes de fonctionnement intelligents, c’est exactement ce que propose ce sommet.
Des villes intelligentes et durables au Moyen-Orient
Aujourd’hui plus de la moitié de la population mondiale vit dans des villes. Cela devrait augmenter à près de deux tiers d’ici 2050 selon le cabinet de conseil Mc Kinsey. Avec l’augmentation de la population, augmentent aussi la demande en nourriture, en eau potable, dans les transports publics et privés et en ce qui concerne soins de santé... tout ce qui affecte la qualité de vie des gens.
C’est là où interviennent les villes intelligentes. De la même manière que les smartphones ont rendu la vie plus facile, il en est de même pour les systèmes numériques à usage du grand public. Cette année le rapport de Mc Kinsey sur les 50 pays les plus développés en terme de technologie, a placé Abu Dhabi a la première place pour la région MENA.
Dubaï se positionne à la deuxième place des villes les plus intelligentes et avant l’expo 2020, les émirats travaillent sur un projet de ville intelligente où internet serait au coeur de tout. Les émirats arabes unis, la Jordanie et l’Arabie Saoudite font partie des pays les mieux classés en terme de capacité numérique, selon un récent rapport.
Le projet saoudien NEOM est l’un des projets de ville intelligente les plus ambitieux à ce jour avec une zone économique de 10.000 mètres carrés et un pont reliant la nouvelle ville à l’Egypte. La ville fonctionnera à 100% avec des énergies renouvelables. Son coût est estimé à 500 milliards de dollars. Si le projet saoudien fonctionne il pourrait devenir un modèle pour d’autres pays.
Reconstruire Alep
Alors que certains pays du Moyen-Orient ont voulu battre des records de hauteur dans leurs constructions d’immeubles, aujourd’hui, la priorité est au développement durable et pratique. Devenir architecte était un rêve d’enfant pour le Libanais Marwan Zgheib qui s’est fait un nom vers 2002, quand il monté sa propre entreprise et attrapé la vague du boom architectural de la région. Ses tours de grande hauteur et ses maisons de luxe sur mesure ont alors vu le jour en Arabie saoudite, au Liban, aux Émirats arabes unis et même au Nigeria,
Son style : des structures géométriques et des espaces de vie conceptuels comme la maison de la méditation au Liban qui se fond dans un paysage montagneux et joue avec la lumière naturelle. Il est aussi l’auteur du siège de la société immobilière Aldar à Abu Dhabi, une incroyable sphère de verre à la construction écologique.
Parmi ses prochains projets, il y a le Ring House, en Arabie saoudite. Un bâtiment durable et rectangulaire entouré d’une structure cylindrique.
Pour Inspire Middle East, Marwan Zgheid nous a ouvert les portes de sa résidence secondaire à Hrajel au Mont Liban. Loin de l’agitation de Beyrouth, c’est une maison qui reflète l’esthétique de son design qui consiste à faire entrer le plein air à l’intérieur.
Rebecca Mac Laughlin Duane : Commençons par une question sur les changements massifs qu’a subi le paysage urbain en 20 ans au Moyen Orient. Qu’est-ce qui le caractérise ? Este-ce une bonne ou une mauvaise chose ?
Marwan Zgheid : En fait, ce sont les deux à la fois. Ces vingt dernières années j’ai vu deux phénomènes. Le premier c’est que la plupart des villes historiques du Moyen Orient ont perdu leur identité. Cela est dû aux différentes guerres, à la reconstruction. Reconstruction sur reconstruction, cela peut être aussi nocif que la guerre. Et l’autre phénomène, c’est que nous avons réalisé que de nouvelles villes voyaient le jour, en particulier dans la zone du Golf et ces villes ont aussi un problème d’identité. Et je ne pense pas que ce soit seulement un problème du Golf ou du monde arabe. Je pense que c’est aujourd’hui un problème banal dans le monde. Je pense qu’il y a une crise dans le langage architectural. Tout se ressemble, partout.
RMD : S’il y a cette crise dont vous parlez, quelle est votre responsabilité en tant qu’architecte ? Est-ce créer des immeubles impressionnants ou fonctionnels par exemple ?
MZ : Le problème c’est que nous partageons la responsabilité avec le client et tout le monde connaît cette obsession de la hauteur, de la taille; vous savez toujours plus grand. Vous voulez construire quelque chose de bien pour la société et en même temps vous voulez faire quelque chose pour que le projet fonctionne. Vous ne pouvez pas réussir la plupart du temps, malheureusement. Je ne pense pas que ce problème soit le propre uniquement du Moyen Orient. Il est maintenant partout en Chine, en Afrique, et même dans des villes conservatrices comme Londres.
RMD : Les gens ne sont-ils pas fatigués de ces immeubles gigantesques dont vous parlez ? Est-ce le seul espace de vie fonctionnel que les architectes peuvent créer ? Envisageons nous quelques chose de différent pour le futur ?
MZ : Malheureusement il n’y a pas de solution avec l’augmentation de la population partout. Le problème c’est pendant qu’on dessine ces villes on ne donne pas de place aux espaces verts, au parcs…
RMD : Beaucoup pensent que le Aldar à Abu Dhabi est une perle échouée sur la rive. Est ce le cas? Quels ont été les principaux défis pour réaliser un immeuble rond ?
MZ : Si vous voulez voir une perle, vous pouvez. Il est inspiré de la nature. Le plus gros défi pour moi était le contact de ce cercle avec le sol. Nous sommes repartis à l’une des plus ancienne théorie de l’architecture et dans chaque esquisse réalisée nous avons réalisé que le cercle incluant un pentacle, une représentation de l‘être humain, du corps humain, du microcosme.
RMD : Marwan, quel est votre plus grand rêve? Quel projet vous a échappé à ce jour? Que voulez-vous construire?
MZ : C’est une question intéressante. Aujourd’hui ce que j’aimerais faire ce sont des petits projets pour être honnête, plus en relation avec la nature, la société. J’aimerais faire des projets en Afrique et j’aimerais participer à la reconstruction d’Alep, l’une des plus belles villes du monde. C’est en Syrie et c’est entièrement détruit maintenant. Ça serait mon rêve.
Le Koweit tourné vers l’avenir
De nombreux pays du Moyen-Orient ont des projets ambitieux pour développer des villes connectées, compétitives et pratiques. L’un de ces projets se trouve au Koweït. C’est un pays qui a une vision à 30 ans pour se transformer en laboratoire pour le commerce, la finance et le tourisme, en réduisant sa dépendance aux revenus pétroliers.
Et au coeur de cette vision, des “villes intelligentes” riches en technologies, dont la première devrait s’étendre dans un désert, juste à l’extérieur de la capitale. Les travaux à quatre milliards de dollars devraient débuter à la fin de l’année prochaine. Le Koweit a fait un partenariat avec la Corée du Sud, championne du high tech, pour rendre ce projet possible. Une fois terminée, la ville de 64 km2 accueillera 400.000 personnes.
Pendant ce temps, les technologies intelligentes sont déjà implantées dans d’autres projets immobiliers, comme South Al-Mutlaa, à côté de la capitale. Les fondations ont juste été bâties pour ce qui est à ce jour le plus grand projet immobilier avec plus 28.000 maisons de qui seront crées. Pour les entreprises architecturales au Koweit, les besoins en constante évolution de la population cassent les codes de la conception traditionnelle.
Reste maintenant à ce que ces idées deviennent un jour réalité au Koweit.