Bourrage des urnes, électeurs fictifs, .... En manifestant dans les rues de Bamako, des partisans de l’opposition ont utilisé tous les substantifs pour remettre en cause la fiabilité du deuxième tour de la présidentielle malienne remportée par le président sortant Ibrahim Boubacar Keïta avec 67,17 % de suffrages. Le Mali ne semble pas trop loin d’une crise post-électorale.
Présidentielle au Mali : des partisans de l'opposition refusent la défaite
“Nous sommes comme des orpailleurs à qui on vient de voler la pépite d’or qu’ils viennent de trouver. Nous, on nous a volé notre vote”. Les partisans de Soumaïla Cissé, déclaré perdant de la présidentielle au Mali, refusent d’accepter que leur champion ne sera pas président.
Les mines sont sombres, les visages fermés, quelques heures après l’annonce de l‘élection pour un second mandat du président sortant Ibrahim Boubacar Keïta, sorti vainqueur du second tour avec 67,17 %, selon les résultats contestés par l’opposition, qui crie à la fraude et promet de les combattre “par tous les moyens démocratiques”.
“Ils viennent de voler nos voix. On ne peut pas accepter ça”, lance Abdramane Sow, un technicien en informatique de 26 ans, qui se prépare à manifester en partageant un plat de riz avec quelques dizaines d’autres militants de l’Union pour la République et la Démocratie, le parti de M. Cissé, dans la grosse villa qui a servi de siège à sa campagne, dans le centre de Bamako.
“Ça fait honte”
Sur une table, deux pancartes rouges frappées du slogan “Respectez le vote des Maliens” sont posées près d’une affiche proclamant “Soumaïla Cissé, l’Espoir”.
Le repas rapidement avalé, les militants rejoignent la caravane d’une centaine de scooters et de quelques dizaines de voitures en train de se constituer face au bâtiment du chef de file de l’opposition, qui ne s’est pas montré depuis l’annonce de sa défaite.
“Il faut que le président sortant arrête. On ne veut pas la violence. On veut la paix. Il a été battu, on a gagné. Mais il a bourré des urnes au nord du Mali. Ça fait honte, ça fait honte de voir l’image du président sortant comme ça”, s‘énerve Abdoulaye Bah avant d’enfourcher sa moto et de se mêler au flot des scooters.
Le cortège se met en branle et se fond rapidement dans la circulation de Bamako, infernale à l’heure de pointe, puis traverse lentement le pont Roi-Fadh pour rejoindre la rive droite du Niger où sont situés les bureaux et le domicile de Soumaïla Cissé.
“Je ne serais pas contre une victoire d’IBK s’il gagnait avec franchise”
À la sortie du pont, sur un balcon, des jeunes femmes saluent les manifestants en scandant “Boua ba bla” (“le vieux, tu vas partir” en bambara, la principale langue au Mali), mais la caravane ne grossit pas.
“Les gens sont groggy. Mais je suis sûr qu’il y aura une réaction”, assure Cheick Fall. Pour ce patron d’une société de télécommunication âgé de 52 ans, le plus “stupéfiant”, ce sont ces “localités du nord où, malgré la sécheresse, l’insécurité et l’absence de moyens de transport, les gens ont parcouru 150 km pour voter, avec un taux de participation de 90%”. Il se dit “plus que sceptique” vis-à-vis de ce résultat.
“Je ne serais pas contre une victoire d’IBK s’il gagnait avec franchise. J’aurais même applaudi, mais je suis très déçu”, ajoute M. Fall.
Dans des véhicules bleus garés dans des contre-allées, les policiers regardent passer sans réagir, le cortège de l’opposition, de plus en plus noyé dans la circulation. Sur leur moto, les jeunes continuent à crier “Soumaïla, Soumaïla”, en s’enfonçant en direction de la banlieue.
IBK n’est pas trop loin de la toute première crise politique de son deuxième et dernier mandant.
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