Un duel inédit pour la présidentielle du 26 au 28 mars en Egypte : le président sortant Abdel Fattah Al-Sissi face à un quasi-inconnu, Moussa Mustapha Moussa. À moins de trois jours de ces joutes aux allures de plébiscite, flash-back sur ces deux candidats aux profils diamétralement opposés.
Présidentielle en Egypte : du David contre Goliath ?
Al-Sissi, la stabilité au sacrifice de la démocratie
Il part déjà victorieux à cette présidentielle terne et sans suspens. Abdel Fattah Al-Sissi, le président sortant qui est accusé d’avoir évincé par voie de violences ou d’intimidation tous les ‘‘candidats gênants’‘, remportera, à moins d’un cataclysme de dernière seconde, le scrutin de lundi.
Comment cet ancien général de l’armée âgé de 64 ans a su mettre à ses pieds, en quelque quatre ans, une Egypte qui avait pourtant chassé du pouvoir Hosni Moubarak de son long règne de 30 années, au nom de la démocratie, lors de la révolution de 2011 ?
Sa formation militaire acquise à l’Académie militaire égyptienne, au Collège de commandement et d‘état-major des forces interarmées à Watchfield, Oxfordshire, au Royaume-Uni, ou encore à l’Army War College des États-Unis à Carlisle, en Pennsylvanie y est probablement pour beaucoup.
Ministre de la Défense sous le président Morsi en 2012, Abdel Fattah Al-Sissi est celui-là même qui a piloté le coup d’Etat contre le président islamiste, en juillet 2013. Mais, Al-Sissi ne court pas aussitôt vers le fauteuil présidentiel. Il prend soin d’organiser une élection présidentielle – qu’il remporte haut la main en 2014 – en vue de légitimer son pouvoir auprès des puissances occidentales et du peuple égyptien. Une fois au pouvoir, il entame une brutale répression contre les Frères musulmans, bord de son prédécesseur Morsi, et renforce ainsi sa popularité en se faisant le chantre de la lutte contre le militantisme islamique.
L‘économie, il en a également fait son levier de pouvoir durant ces quatre dernières années. La réalisation de multiples projets d’infrastructures à grande échelle couplée à la mise en œuvre de douloureuses réformes d’austérité a notamment permis à l‘économie égyptienne de retrouver des couleurs, mais au prix d’une inflation qui a gravement nui à la classe moyenne égyptienne.
En dépit de ces réalisations, le général Al-Sissi reste largement critiqué pour sa gestion des droits de l’homme en Egypte. Mais, lui, et il ne s’en cache pas, préfère prioriser la stabilité plutôt que les libertés, en vue de maintenir le train de ses réalisations.
Moussa Mostafa Moussa ou le fantasme de la compétition
Que dire à présent de son adversaire, entré in-extrémis dans la course à la présidentielle, Moussa Mostafa Moussa ? Pour bien d’analystes, il n’est qu’un “figurant” ou candidat “fantoche” qui vient éviter que ces élections ne se transforment en une farce. Une thèse qu’il rejette vigoureusement. Pour cet architecte de 66 ans, il est bien plus qu’un “vernis” électoral, même si sa campagne ne le reflète pas.
Le 11 mars, c’est devant un auditoire de 30 personnes qu’il a étalé son programme de campagne. Le premier meeting qu’il a tenu, selon l’Associated Press, était carrément un désastre avec pour seuls partisans que quelques membres de son équipe de campagne.
Un échec qu’il met au compte de son manque de moyens financier, mais qui contraste toutefois avec son passé politique. En effet, c’est très tôt que cet architecte professionnel passé par l‘École nationale supérieure d’architecture de Versailles s’est aventuré dans les affaires politiques. Jeune, il a été membre de l’organisation de la jeunesse du parti New Wafd, avant de devenir en septembre 2005, le président du parti El-Ghad. Depuis, il s’est investi dans des affaires, avec succès.
Peut-il rêver du même succès à la présidentielle ? Il est probablement le seul à le croire, du moins officiellement. Car, pour lui, son programme intitulé “le capitalisme national”, renferme pas mal de points qui devraient attirer l’attention sur lui.
Ce programme pas encore officiellement disponible, mais dont il a parlé au cours d’interviews, prévoit entre autres la réouverture de plus de 2 000 usines laissées à l’abandon dans le pays.
“En contrepartie d’une formation gratuite et d’un accès facilité à l’investissement, chaque personne reverse 50 % de son salaire aux membres de sa famille. Ainsi, avec un emploi, on améliore la vie de cinq, six personnes. Avec trois millions de travailleurs, cela veut dire qu’on met 18 millions de personnes à l’abri”, a-t-il par ailleurs confié lors d’un entretien avec le site L’Orient Le Jour.