Qualifié par l’opposition de candidat faire-valoir au service du chef de l’Etat Abdel Fattah al-Sissi, Moussa Mostafa Moussa sera son unique concurrent lors de l‘élection présidentielle égyptienne qui débute lundi.
Moussa Mostafa Moussa, partisan et concurrent de Sissi à la fois
Après avoir fait campagne pour M. Sissi, cet homme d’affaires de 65 ans s’est déclaré candidat, fin janvier, à la toute dernière minute.
Le jour même du dépôt de sa candidature, une page Facebook au nom de Moussa Mostafa Moussa arborait encore une photo du président Sissi, qui a disparu ensuite.
“Non à la participation à cette mascarade”, lançait dès le lendemain Hamdeen Sabbahi, candidat défait à la présidentielle en 2012 et 2014, lors d’une conférence de presse rassemblant huit partis d’opposition.
Si M. Mostafa Moussa se retrouve seul face à M. Sissi, c’est que plusieurs prétendants ont été évincés. Deux d’entre eux, dont l’ex-chef d‘état-major Sami Anan, ont été interpellés, et d’autres comme l’avocat Khaled Ali, ont dénoncé des pressions de la part des autorités.
Craignant que M. Sissi se retrouve candidat unique, ses partisans avaient tenté de pousser la candidature d’un des leurs, Sayed El-Badawi, président du parti libéral Al-Wafd. Mais le parti de ce dernier s’y est opposé. M. Mostafa Moussa est alors apparu comme l’homme providentiel dans le rôle d’adversaire du président.
– ‘Equilibrer’ l‘élection – L’intéressé explique à l’AFP qu’il fallait “équilibrer” le scrutin. Avec sa participation, l‘élection devient “bien claire, bien démocratique”, car M. Sissi n’est “plus le seul candidat”, plaide-t-il.
Et malgré son statut de concurrent de M. Sissi, il reste loyal au président: “ce n’est pas nouveau, nous avons la même conception de la politique”, reconnaît-il.
Depuis la vague de manifestations de juin 2013, à la faveur desquelles M. Sissi, alors chef de l’armée, a destitué le président islamiste Mohamed Morsi, Moussa Mostafa Moussa s’est rangé dans le camp Sissi.
Le candidat admet que sa campagne, financée par ses propres fonds, “n’est pas comparable avec celle du président”.
Interrogé ensuite sur les critiques des ONG internationales qui reprochent au pouvoir des violations des droits de l’Homme, M. Mostafa Moussa esquive la question. “Je ne veux pas juger ce que je ne connais pas”, dit-il.
Pourtant, M. Mostafa Moussa se défend d‘être sous le contrôle de M. Sissi: “j’ai des idées, des conceptions et je vois les choses d’une autre façon”, dit le candidat qui a reçu notamment le soutien des tribus arabes d’Egypte.
“Je rentre dans cette élection avec l’idée de gagner”, assure-t-il, en dépit de tous les pronostics favorables à M. Sissi, qui avait remporté la présidentielle de 2014 avec 96,9% des suffrages.
Lors d’une conférence de presse mercredi dernier, M. Mostafa Moussa a précisé: “notre but dans cette élection est d’atteindre le pourcentage le plus élevé possible. J’espère 51%”.
Président du parti libéral Al-Ghad (Demain) depuis 2011, cet industriel, fils d’un ancien parlementaire, se targue de posséder un programme économique “bien établi”, fondé sur le développement des exportations.
– Concurrence ‘rhétorique’ – Interrogé sur les détails de ce programme à quelques jours de l‘élection, l’intéressé répond qu’un “comité” est en train de les finaliser.
Adel Esmat, son porte-parole, affirme que si le candidat l’emporte, il va “travailler à combler le fossé (dans la société égyptienne) qui a permis l’avènement des Frères musulmans”, au pouvoir en 2012 et 2013 avant de subir la répression.
Doté de faibles moyens financiers, méconnu du grand public et seul face au président sortant, M. Mostafa Moussa ne représente pas une menace pour M. Sissi.
En revanche, sa participation fournira au pouvoir “l’apparence d’une certaine forme de concurrence, même si elle n’est que rhétorique”, estime H.A. Hellyer, chercheur non-résident à l’Atlantic Council à Washington.
Début mars, le visage rond et souriant du “challenger” est apparu sur quelques rares affiches dans les rues du Caire aux côtés des innombrables portraits du président Sissi.
Attaqué par l’opposition sur l’authenticité de ses diplômes obtenus en France, il s’est défendu en fournissant aux journalistes des copies des diplômes de l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Versailles.
Tout a été validé par la justice et l’autorité électorale, assure-t-il.