Des responsables du mouvement sécessionniste camerounais auraient été arrêtés le 5 janvier au Nigeria, selon les sources proches du mouvement. Une information que démentent les autorités nigérianes et camerounaises tout en s’accusant mutuellement.
Crise anglophone au Cameroun : confusion autour de l'arrestation des leaders séparatistes au Nigeria
Au commencement communiqué diffusé sur les réseaux sociaux par les « autorités » de « l’Ambazonie » (république que le mouvement séparatiste entend créer après sa séparation du Cameroun). Le texte ambazonien faisait état de l’arrestation au Cameroun de huit responsables du mouvement dont Sisiku Ayuk Tabe, président du mouvement séparatiste anglophone au Cameroun.
Le leader et ses lieutenants auraient été capturés le 5 janvier, alors qu’ils étaient en réunion dans un hôtel d’Abuja, capitale du Nigeria. “Vers 19H30, les hommes armés sont venus dans un hôtel et les ont tous enlevés, y compris le président,” a déclaré Chris Anu, secrétaire chargé des communications de l’Ambazonie, nom donné par les séparatistes à leur projet de pays.
Pas assez de détails
Avis partagé par des médias nigérians, qui estiment eux aussi que Sisiku Ayuk Tabe a été arrêté par les services de renseignement nigérians (Department of State Services – DSS).
Mais le DSS a démenti l’information. Il précise toutefois avoir arrêté fin décembre des Camerounais soupçonnés de séparatisme dans l’Etat oriental de Taraba. “Il n’y a rien eu de semblable,” a déclaré un haut responsable du DSS sous couvert de l’anonymat. “Il n’y a pas eu d’arrestation des leurs à Abuja”. “Il y a eu une opération commune dans le Taraba le 31 décembre 2017 pendant laquelle des Camerounais ont été arrêtés”, a-t-il ajouté. “Nous avons considéré la plupart d’entre eux comme des réfugiés, mais quand les autorités camerounaises ont entendu parler des arrestations, elles ont protesté auprès de l’inspecteur général de la police en disant que les personnes arrêtées faisaient partie de ceux qui provoquent des troubles comme sécessionnistes”, poursuit le DSS.
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De son côté, le Cameroun semble muet sur le sujet. Joint par RFI, le porte-parole du gouvernement camerounais Issa Tchiroma Bakary a refusé de faire de commentaires. Pour lui, ce sont « des rumeurs diffusées sur les réseaux sociaux ».
Démenti d’un côté, recadrage de l’autre, .... Voilà qui risque d’alimenter une série de confusions. Quitte à ouvrir un nouvel et long épisode de ping-pong médiatique et diplomatique entre le Cameroun et le Nigeria. L’exportation de la crise anglophone semble cacher son lot de conséquences diplomatiques.
La minorité anglophone du pays (environ 20% des 23 millions d’habitants) proteste contre sa « marginalisation » depuis plus d’un an. Si certains anglophones exigent le retour au fédéralisme, une minorité réclame la partition du Cameroun. Deux scénarios que refuse catégoriquement Yaoundé.
Les violences découlant de cette crise engendrent “une situation humanitaire préoccupante, avec des milliers d’habitants qui ont fui vers le Nigeria voisin et des dizaines de milliers vers d’autres départements moins exposés ou dans les régions francophones”, a indiqué récemment le centre d‘études International Crisis Group.