Les Algériens, appelés à élire leur députés le 4 mai lors d’un scrutin sans enjeu majeur, sont beaucoup plus passionnés par la présidentielle en France, le candidat Emmanuel Macron apparaissant clairement comme le préféré des autorités et de la population.
Les Algériens se passionnent pour la présidentielle française
“Bravo Emmanuel Macron”, a posté sur son compte Facebook Yazid Chalal après l’annonce de la victoire du chef d’En Marche au premier tour de la présidentielle française.
“Il constitue un rempart contre l’extrême droite hostile aux Algériens (...) Il a eu le courage de dénoncer la colonisation”, a ajouté cet homme de 52 ans.
En visite à Alger en février où il a été reçu avec les honneurs, M. Macron avait qualifié la longue colonisation française (1830-1962) de “crime contre l’humanité”.
Ses propos ont suscité de la sympathie en Algérie mais soulevé une polémique en France où la candidate d’extrême droite Marine Le Pen, sa rivale pour le second tour, les a qualifiés de “crime” contre le pays.
A l’issue du premier tour, le chef de la diplomatie algérienne Ramtane Lamamra a rendu hommage à M. Macron en le qualifiant d’“ami de l’Algérie”. Il n’a en revanche pas parlé de Mme Le Pen, dont le père Jean-Marie, qui fut un partisan de l’Algérie française, est honni dans le pays.
‘Enjeu politique’
Avec l‘élimination de la course présidentielle de la droite (Les Républicains) et la gauche (Parti socialiste), les victoires de Mme Le Pen et M. Macron ont mis fin au traditionnel clivage qui définit la vie électorale française depuis plus d’un demi-siècle.
“En France, il y a une élection avec un enjeu politique alors qu’en Algérie (...) c’est un scrutin sans enjeu”, analyse le sociologue Nacer Djabi.
Le Front de libération nationale (FLN, qui domine le Parlement depuis l’indépendance) et son allié le Rassemblement national démocratique (RND) devraient en effet conserver leur majorité au Parlement, selon les observateurs.
“Ici, les gens suivent la présidentielle française. Les législatives (en Algérie), on s’en fout complètement”, lance à la cantonade le serveur d’un restaurant algérois sous les sourires des clients.
Selon M. Djabi, les conséquence d’une victoire de Marine Le Pen seraient “désastreuses”. “Les millions d’Algériens vivant en France et les milliers qui font l’aller-retour entre les deux rives de la Méditerranée vont pâtir de ses positions xénophobes”, estime-t-il.
Les Algériens forment une des plus importantes communautés étrangères en France et sont des centaines de milliers à détenir la double nationalité et à voter dans l’Hexagone.
“Il n’y a pas une seule famille algérienne qui n’ait pas un proche en France”, note Amar, un médecin septuagénaire dont les deux filles vivent à Paris.
Les ‘vieux’ au pouvoir
Après un tassement de l‘émigration professionnelle dans les années 70, le mouvement a repris vingt ans après en raison de la guerre civile. Ces derniers temps, ce sont les diplômés de l’enseignement supérieur qui partent par milliers vers la France.
Or certains craignent de ne plus pouvoir s’y rendre en cas d‘élection de Marine Le Pen. “Si c’est Macron qui est élu, l’espoir est permis”, déclare Hamid, un étudiant en médecine qui rêve de décrocher un poste en France.
Depuis des semaines, la campagne électorale en France est abondamment commentée par la presse et sur les réseaux sociaux, inspirant une série de caricatures dans les journaux francophones.
Le célèbre dessinateur de presse Ali Dilem a osé dans le quotidien Liberté une caricature du président Abdelaziz Bouteflika, 80 ans, intitulée “Le Maroc provoque l’Algérie”, en référence à des accusations de Rabat contre Alger sur l’expulsion de réfugiés syriens vers la frontière marocaine.
Le chef de l’Etat est assis dans un fauteuil roulant avec une perfusion. En face de lui, un Algérien tient en main une caricature de Macron sur laquelle est inscrit son âge, 39 ans, et lance: “La France aussi”.
“L’Algérie est un pays de jeunes gouvernés par des vieux. Ces jeunes aimeraient bien avoir ici un candidat à la présidentielle ayant le profil de Macron”, estime M. Djabi.
AFP