Crise gambienne : chapeau bas à la Cédéao

A l’annonce de l’ancien président gambien Yahya Jammeh de contester la victoire de son successeur Adama Barrow qu’il avait pourtant préalablement reconnue, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a tout tenté pour ramener l’ancien dirigeant à la raison. Entre intervention armée et médiation, l’organisation ouest-africaine a privilégié la voie du dialogue. Un choix payant; l’ancien président a finalement quitté le pays samedi

Les derniers développements de la crise gambienne laissent penser qu’il n’y aura finalement pas d’intervention militaire. A l’aube du samedi 21 janvier, l’ancien président gambien, Yahya Jammeh a décidé de renoncer au pouvoir à la grande joie de milliers de Gambiens dont environ 45 000 ont fui vers le Sénégal voisin par crainte de violences armées.

Une décision qui selon lui, relève de sa seule volonté. Mais à vrai dire, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest a beaucoup joué dans cette issue heureuse de la crise postélectorale en Gambie.

Un ballet présidentiel

Une semaine après avoir félicité son adversaire à la présidentielle, Yahya Jammeh virevoltait le 10 décembre. L’ex-homme fort de Banjul, au pouvoir depuis plus de 22 ans conteste la victoire d’Adama Barrow et fait recours à la justice pour annuler les résultats de l‘élection. La Cédéao s’en émeut et enjoint à Jammeh de rendre immédiatement le pouvoir.

Un ton certes ferme, mais qui sera accompagné d’une première tentative de médiation. Le 13 décembre 2016, c’est une délégation composée du président nigérian Muhammadu Buhari – médiateur désigné dans la crise gambienne -, Ellen Johnson Sirleaf, la présidente libérienne et John Dramani Mahama – le président sortant du Ghana – qui a reconnu sa défaite – qui se rendent à Banjul pour y rencontrer Yahya Jammeh.

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Sa réponse ce jour-là est sans détour : il ne partira pas tant qu’il ne se sera pas assuré que les résultats de l‘élection sont crédibles. Le vendredi 13 janvier, la mission est renconduite avec toujours le même objectif, rendre le pouvoir au président élu dont la cérémonie d’investiture est prévue pour le 19 janvier. Mais une fois de plus, la Cédéao essuie un échec.

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Le temps presse et les événements s’enchaînent en Gambie. Yahya Jammeh qui a déposé un recours devant la Cour suprême proclame le 17 janvier un état d’urgence de 90 jours invoquant “un niveau d’ingérence étrangère exceptionnel et sans précédent” dans le processus électoral et les affaires du pays.

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Mohamed Ould Abdel Aziz, le président de la Mauritanie est ainsi envoyé en pompier le 18 janvier, avec dans sa malette des propositions d’asile pour le président sortant, sa famille et ses proches. Lui aussi président d’une République islamique, comme la Gambie depuis 2015, pourrait faire vasciller Jammeh, pense la Cédéao, que la Mauritanie a pourtant quitté en 1999.

Dans la foulée, le Maroc tente également de convaincre Jammeh avec des promesses d’un asile doré au royaume chérifien. Mais c’est sans compter avec la tenacité de l’ancien soldat qui impose un nouveau refus.

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La Cédéao durcit alors le ton. Le président de la Commission, Alain Marcel de Souza menace que Yahya Jammeh partira de gré ou de force. Des troupes de la Cédéao sont aussitôt déployées aux portes de la Gambie dans la soirée du 18 janvier. Jammeh qui connaît de nombreuses défections dans son gouvernement, se fait également abandonner par son armée qui refuse de combattre à ses côtés.

Le 19 janvier, après l’investiture d’Adama Barrow à l’ambassade gambienne du Sénégal – pays où il réside depuis quelques jours – un vote à l’ONU autorise une intervention armée en Gambie. Les soldats de la Cédéao pénètrent en Gambie. Le 20 janvier, ultimatum est donné à Jammeh de rendre le pouvoir avant midi au risque de s’y voir contraindre par les armes.

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Médiation de la dernière chance

Dans l’attente de l‘épuisement de ce deadline, l’on apprend que le président guinéen Alpha Condé – réputé être un ami de Yahya Jammeh – se rendra à Banjul après une escale chez son homologue mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz pour une ultime médiation. Finalement, on apprendra dans la soirée que les deux présidents sont à Banjul.

Pendant ce temps, Yahya Jammeh et ses hommes sont pris en sandwich. Les forces de la Cédéao n’attendent que le feu vert pour le sortir du palais.

Mais coup de théâtre, au milieu de longues tractations, Yahya Jammeh annonce à l’aube du samedi 21 janvier qu’il renonce au pouvoir et qu’il accepte de quitter la Gambie. Mais, les négocations butent toujours sur le prochain lieu de destination de l’ancien président gambien qui aura tenu en haleine l’Afrique durant des semaines.

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La Cédéao, elle, aura été jusqu’au bout. Entre négociations, intervention militaire ou encore multitude de sanctions ciblées, l’organisation avait toutes les cartes en main pour faire plier Yahya Jammeh, d’autant que ce dernier était affaibli. Mais en choisissant la voie du dialogue, la victoire de la Cédéao – dont l‘échec en Côte d’Ivoire lors de la crise postélectorale 2010-2011 est encore frais – est encore plus retentissante.

Jammeh leaves Palace? #Gambia #gambiacrisis #Gambie pic.twitter.com/r0WVRqhMCl— GhanaSoccer (@Ghanasoccer) 21 janvier 2017
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