Congo : la misère des ouvriers de la carrière de Kombé

Au Congo, la vie recommence doucement après une semaine de peur suite aux élections. Les populations reprennent peu à peu leurs activités. Certains, comme les ouvriers de la carrière de Kombé, sur les rives du fleuve Congo, ont repris leurs outils pour trouver de quoi joindre les deux bouts dans un pays où près de 60 % des jeunes sont au chômage.

Une semaine d’inactivité semble une éternité pour les Congolais. Mais ils commencent à reprendre en douceur leurs activités après la peur de violences après la réélection de Denis Sassou Nguesso dès le premier tour de la présidentielle du 20 mars 2016. Et pas de temps à perdre surtout pour ceux qui vivent de petits boulots et qui tentent tant bien que mal de joindre les deux bouts.

Sur les rives du fleuve Congo, par exemple, plusieurs dizaines de jeunes investissent tous les jours la carrière de Kombé, dans le sud de la capitale Brazzaville pour essayer de gagner quelques francs pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles. Un travail difficile, mais dans un pays où environ 60 % des jeunes sont au chômage, le choix ne leur est pas vraiment offert. « On souffre, mais on n’a pas le choix », dit André. « C’est un métier difficile, très difficile. Notre gouvernement, c’est parmi eux. Il bouffe l’argent parmi eux. Il ne se soucie pas des jeunes. », appuie Glad, ouvrier de la carrière depuis 2004.

Un sentiment partagé par Léonie, une autre ouvrière de la carrière : « Il n’y a pas de boulot, il n’y a pas d’autre chose à faire donc c’est mieux de venir ici pour chercher les petites pierres comme ça », explique-t-elle.

Rémunérés à 2000 francs la benne

En slip, short ou boxeur, ils usent de leurs muscles pour charger de gros camions-bennes stationnés sur la berge. Pelleté après pelleté, ils remplissent les véhicules de sable. Leur vie tourne quotidiennement à ce rythme éreintant. Un balai incessant de pelles peu rémunéré, 2000 francs CFA (environ 3 euros) par benne, payés à la tâche par l’employeur.

Mais ce n’est pas tous les jours que la chance sourit, d’autant que dans cette petite carrière artisanale l’activité est saisonnière, rythmée par les pluies équatoriales. « Une très bonne journée, on peut faire dix bennes. Mais on n’est pas certain d‘être embauché tous les jours. », dit André, qui affirme faire ce travail depuis cinq ans. Un travail que ce jeune homme de 23 ans doit effectuer dans la souffrance et la peur de perdre sa principale source de revenus.

Exploitant de la carrière, Alfred Mabandza ne cache pas son regret de voir l‘État congolais soutenir les compagnies nationales et internationales installées au Congo, au détriment des ouvriers locaux. « L’État privilégie les Chinois, les Socofran et les grandes entreprises par rapport à nous. Leur vie tourne quotidiennement à ce rythme éreintant », dénonce-t-il.

Une activité saisonnière

Dans cette carrière, l’activité dépend des commandes des clients du patron, qui vend son sable essentiellement à des particuliers pour la construction de maisons, explique Alfred Mabanza, le chef de la carrière, qui dispose d’une concession accordée par les autorités. On y extrait aussi de la roche que des petites mains concassent à longueur de journée en gravier, avec pour seul outil un burin cylindrique en métal qui tient dans la main.

Assise devant un tas de cailloux à l’ombre d’un pagne suspendu aux branches d’un palmier chétif, Léonie, la cinquantaine, explique n‘être guère maîtresse de son destin : « Toujours, il faut que tu forces pour venir travailler [...] Il n’y a pas de boulot, il n’y a pas d’autre chose à faire donc c’est mieux de venir ici. » Mais elle n’a cette opportunité que pendant la grande saison sèche (mi-mai à mi-septembre) et la petite saison sèche (janvier-février), qui traîne en longueur cette année.

Et les ouvriers en profitent au maximum pour retrouver un semblant de stabilité, car pendant la saison des pluies, il faut trouver autre chose. Pour Alfred, c’est l’occasion de reprendre les vis et autres clés pour offrir ses services de mécanicien à qui voudra bien l’employer. C’est la seule façon pour lui de faire face à la misère dans ce petit pays pétrolier et forestier, où la pauvreté et le chômage sont largement répandus. Le Fonds monétaire international (FMI) estime à 40 % le taux de chômage de la population et à 60% celui des jeunes.
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