Mozambique : l'opposition appelle à l'annulation des élections

L’opposition au Mozambique a appelé samedi à l’annulation des élections générales du 15 octobre, accusant le gouvernement d’avoir violé un accord de paix en recourant à la violence et à des actes d’intimidation le jour du scrutin.

Les Mozambicains ont voté mardi dans un climat de vives tensions, au terme d’une campagne violente alimentée par des accusations de fraudes au profit du régime lancées par l’opposition et la société civile.

La Commission électorale (CNE) a commencé vendredi à publier des résultats très partiels des élections présidentielle et législatives, qui donnent sans surprise une large avance au président sortant et au parti au pouvoir.

“Le Front de libération du Mozambique (Frelimo, au pouvoir) (...) a violé l’accord de cessation des hostilités qui dit qu’il ne faut pas commettre d’actes de violence et d’intimidation dans la poursuite d’objectifs politiques”, a écrit la Résistance nationale du Mozambique (Renamo, opposition) dans un communiqué.

Vendredi, les corps criblés de balles de la dirigeante de la Ligue des femmes de la Renamo et de son mari ont été retrouvés dans la province de Tete (ouest), a annoncé le réprésentant local de ce parti, Evaristo Sixpense. Leur disparition avait été signalée à la veille du scrutin. Selon M. Sixpense, il ont été victimes d’une embuscade tendue par des inconnus au moment où il distribuaient des copies des listes électorales.

Leurs morts portent à dix le nombre des personnes tuées depuis le début de la campagne électorale, selon la mission locale d’observateurs Centro de Integridade Publica.

La Renamo affirme que certains de ses délégués ont été arrêtés après avoir surpris des organisateurs du scrutin qui distribuaient plus d’un bulletin de vote pour le Frelimo aux électeurs.

“Il y a eu des arrestations arbitraires d’agents (...) et des électeurs qui ont essayé de se plaindre de tout, du bourrage d’urnes électorales, n’ont pas été en mesure d’exercer leur droit de vote”, poursuit la Renamo.

La Renamo a appelé à la tenue de “nouvelles élections”.

Des responsables gouvernementaux n‘étaient pas joignables dans l’immédiat pour commenter ces accusations.

Ces élections avaient valeur de test après le fragile accord de paix conclu en août entre le parti au pouvoir et la Renamo, l’ex-rébellion active pendant la guerre civile (1975-1992).

Cet accord était censé mettre un point final à leurs affrontements, récurrents depuis plus de quarante ans. Mais la campagne électorale a ravivé les tensions entre les deux camps.

Après dépouillement de 830.000 bulletins exprimés, soit à peine plus de 6% des 13,1 millions d‘électeurs inscrits, l’actuel chef de l’Etat Filipe Nyusi, qui brigue un deuxième mandat, est crédité de près de 75% des suffrages, selon les résultats publiés par la CNE sur son site internet vendredi.

Il devance largement son concurrent, Ossufo Momade, le chef de la Renamo, créditée de 20% des voix, selon ces mêmes résultats.

A la dernière présidentielle, M. Nyusi l’avait emporté avec 58% des voix devant le chef historique de la Renamo, Afonso Dhlakama (37%).

Si elles ont salué le déroulement “globalement normal” du scrutin mardi, les principales missions internationales d’observateurs ont émis de nombreuses réserves sur l‘équité et la régularité de la campagne et sur le dépouillement du vote.

L’ambassade des Etats-Unis a exprimé vendredi d’“importantes inquiétudes liées à (...) des irrégularités qui pourraient avoir des conséquences sur la perception de l’intégrité du processus électoral”.

Elle a notamment cité des “divergences” entre les listes électorales et le recensement démographique dans plusieurs régions, notamment dans les provinces de Gaza (sud) et de Zambezie (centre).

Elle s’est aussi étonnée que dans nombre de bureaux de vote à Gaza, le taux de participation affiché en fin de journée était “près de 100%” alors qu’il était resté “faible jusque dans le milieu de l’après-midi”.

Pour les législatives, le Frelimo, qui dirige le Mozambique sans partage depuis son indépendance en 1975, pointe largement en tête avec 70% des voix après dépouillement de 750.000 bulletins, devant la Renamo avec 22% des suffrages, selon les premiers résultats.

Affaibli par une crise financière, un scandale de corruption et une insurrection jihadiste dans le nord du pays, le Frelimo avait réalisé sa plus mauvaise performance de son histoire en 2018 aux élections locales, avec un score national de 51,8%.

La CNE doit annoncer lundi les résultats des élections provinciales qui se sont également déroulées mardi.

La Renamo espérait, avant le scrutin, prendre le contrôle de plusieurs des dix provinces du pays.
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