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Des Maliens réclament la protection de l'État contre les djihadistes

Un partisan du président intérimaire malien Assimi Goita brandit son image lors d'un rassemblement pro-Junta et pro-Russie à Bamako, le 13 mai 2022   -  
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OUSMANE MAKAVELI/AFP or licensors

Mali

Des dizaines de Maliens ont manifesté mardi à Bankass, dans le centre du pays, pour réclamer la protection de l'État après le massacre attribué à des djihadistes de plus de 130 civils dans des villages voisins où la recherche de disparus de poursuivait.

Le Mali a connu au cours du week-end un de ses pires carnages de civils, qui est aussi la dernière tuerie en date d'une série en cours à travers le Sahel. Selon le gouvernement, 132 civils ont été tués par des hommes de la Katiba Macina, le groupe du prédicateur peul Amadou Kouffa, à Diallassagou et dans deux localités environnantes, à quelques dizaines de kilomètres de Bankass

Le bilan de l'assaut pourrait continuer de grimper après la découverte de nouveaux corps de victimes selon la police mardi. Il pourrait dépasser les "200 morts et disparus" selon un responsable local.

Le chef de la junte, le colonel Assimi Goïta, a décrété trois jours de deuil. La classe politique bamakoise a unanimement exprimé sa compassion tout en se ralliant une nouvelle fois autour des forces armées. Mais le Cadre d'échange, regroupement d'une dizaine de partis, rare voix critique, a demandé au colonel Goïta de se rendre sur place et en a appelé "à la responsabilité des autorités pour prendre les mesures nécessaires afin que de telles tragédies ne se reproduisent" pas.

Le gouvernement a dépêché mardi une délégation sur les lieux, à 500 km au nord-est de Bamako. La population a manifesté à Bankass, chef-lieu du secteur. Des photos transmises par une association communautaire dogon montrent plusieurs dizaines de personnes rassemblées dans la rue. Un collectif composé d'élus locaux et de représentants de la société civil a appelé à la "désobéissance civile", jusqu'à nouvel ordre.

Bain de sang

"Nous sommes rassemblés malgré la pluie pour réclamer la sécurité, et condamner les crimes. Le gouvernement doit assurer notre sécurité", a expliqué Oumar Togo, un membre de l'association des jeunes de Bankass.

Des élus locaux relatant les faits ont rapporté l'arrivée de dizaines de djihadistes à moto, la rafle et le massacre des hommes, la destruction des échoppes par les flammes, le pillage des villages et le vol de bétail. Le bain de sang aurait culminé dans la nuit de samedi à dimanche.

Les populations ont fui quand elles le pouvaient. Elles continuaient à chercher les disparus mardi, faisant craindre un bilan encore plus lourd. Comme souvent, les informations ont mis du temps à remonter de ces zones rurales reculées, peu connectées et difficiles et dangereuses d'accès.

Crise sécuritaire

Depuis l'apparition en 2015 de la Katiba Macina dans le centre du Mali, la région est livrée aux exactions djihadistes, aux agissements des milices proclamées d'autodéfense et aux représailles intercommunautaires. Le 23 mars 2019, plus de 160 civils peuls avaient été massacrés dans le village d'Ogossagou.

Mais c'est tout le Mali qui est plongé dans une profonde crise sécuritaire, politique et humanitaire depuis le déclenchement d'insurrections indépendantiste et djihadiste en 2012 dans le nord. La propagation djihadiste a gagné le centre et les pays voisins, Burkina Faso et Niger.

Les violences ont fait des milliers de morts, combattants et civils, et des millions de déplacés dans une des régions les plus pauvres de la planète.

Spirale mortifère

Les militaires arrivés au pouvoir à Bamako en 2020 après des mois de contestation dirigée contre l'incapacité du gouvernement civil à stopper la spirale mortifère ont réaffirmé lundi que la sécurité des personnes restait leur "priorité absolue". Ils se sont détournés des anciens alliés militaires du Mali, à commencer par les Français, et tournés vers les Russes.

Mais le pays a connu ces derniers mois une série de tueries, en particulier dans les régions de Ménaka (nord-est) et de Gao (nord), et dans la zone dite des trois frontières, aux confins du Niger et du Burkina Faso. Le Burkina Faso a connu en juin un des pires massacres de son histoire avec la mort de 86 civils tués par des jihadistes à Seytenga (nord).

Les civils sont soumis aux représailles de djihadistes qui les accusent de pactiser avec l'ennemi. Dans certaines zones, de plus en plus étendues dans le centre et passées sous l'emprise des djihadistes, ces derniers appliquent avec vigueur leur vision sociale. Les civils se retrouvent aussi souvent pris entre deux feux dans les affrontements entre groupes rivaux, y compris entre ceux affiliés à Al-Qaïda et à l'organisation État islamique.

Tueries en masse

Les évènements de Diallassagou suscitent un certain nombre d'interrogations. Les tueries en masse portent davantage la marque des groupes affiliés à l'État islamique qu'à Al-Qaïda. Mais la zone de Bankass est bel et bien le champ d'action de la Katiba Macina.

Nouhoum Togo, président d'un parti ayant son assise à Bankass, a parlé auprès de l'AFP de représailles des djihadistes contre les locaux. L'armée malienne avait elle-même rapporté avoir mené une opération le 10 juin dans le cercle de Bankass et avoir "neutralisé" six djihadistes. Les djihadistes seraient revenus se venger contre les populations, affirme Nouhoum Togo.

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