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Massacres de Bisesero : l'armée francaise vers un non-lieu

Photo d'archive du 7 avril 2021 montre des photos des victimes au Mémorial du génocide de Kigali.   -  
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SIMON WOHLFAHRT/AFP or licensors

Rwanda

Les troupes françaises sont en passe d’éviter un procès sur le génocide rwandais. Ce lundi le parquet de Paris a requis un non-lieu sur le rôle de la France lors des massacres de Bisesero en juin 1994.

Près de trois ans après la fin des investigations, le parquet a enfin rendu sa décision dans ce dossier sensible, emblématique de la controverse historique sur les objectifs de la mission militaro-humanitaire Turquoise déployée au Rwanda sous mandat de l'ONU pour faire cesser le génocide des Tutsis. Partie civile dans cette affaire, l'association Survie accuse l'armée francaise de complicté de génocide pour son inaction. Un non-lieu serait pour elle une décision purement politique.

"C'est un déni de justice. Le rapport Duclert et les acteurs de l'époque, en particulier le chef de l'armée, disent bien que- toutes les décisions étaient sous son contrôle, et c'est donc ridicule que les juges prétendent que les militaires sur le terrain étaient autonomes", déclare Francois Garnier, historien et porte-parole de l'association Survie. La position du ministère public était prévisible puisqu'aucun des cinq officiers généraux impliqués n'avaient été mis en examen au terme de l'enquête conclue en juillet 2018, une étape pourtant nécessaire avant d'envisager un éventuel procès.

La demande de non-lieu fait suite à la publication en mars du rapport Duclert. Le document concluait que Paris était demeurée "aveugle" face aux préparatifs, mais pas complice des massacres. "Il s'agit très probablement d'un marchandage, du donnant-donnant : on enterre les affaires judiciaires pour pouvoir se tourner vers le futur, et surtout ne rien avoir à changer, ni de la politique africaine de la France, ni de la structure des institutions de la Ve République", avance Francois Garnier.

Selon l'ONU, le génocide rwandais a fait plus de 800 000 morts entre avril et juillet 1994, essentiellement au sein de la minorité tutsi. Environ 50 000 personnes ont été massacrés dans la région de Bisesero. "C'est évidemment non seulement une très grosse déception pour les rescapés et pour nous, mais surtout, si on veut pouvoir tirer les leçons pour ne pas que ça se reproduise, il ne faut surtout pas enterrer la vérité et la justice de cette façon-là", poursuit le porte-parole de Survie.

Entourage de Francois Mitterand

Si les juges d'instruction devraient suivre les requisitions du parquet, ils pourraient également relancer des investigations. Les associations réclament toujours un procès contre les militaires, mais aussi contre l'entourage de l'ancien président Francois Mitterand, jamais visés par l'enquête. Elles demandent aux juges de réinterroger les deux principaux officiers : le colonel Jacques Rosier, chef des opérations spéciales présent à Bisesero, et le général Jean-Claude Lafourcade, commandant de l'opérationTurquoise.

Les associations insistent surtout pour que les magistrats interrogent l'état-major de l'époque à Paris ainsi que, pour la première fois, l'entourage du président François Mitterrand : son chef d'état-major particulier Christian Quesnot, son conseiller Afrique Bruno Delaye et le secrétaire général de l'Elysée Hubert Védrine. Mais les magistrats, confirmés par la cour d'appel en 2019, ont déjà refusé plusieurs fois de convoquer le sommet de l'Etat, estimant n'être saisis que des responsabilités des militaires sur place.

Sans commenter Bisesero, quatre des cinq officiers mis en cause, Jacques Rosier, Jean-Claude Lafourcade, Marin Gillier et Etienne Joubert, ont défendu, dans un communiqué mi-avril, l'opération Turquoise qui "a sauvé de très nombreuses vies, protégé et soigné les victimes d'une situation qui échappait à l’entendement".

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