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Des Djiboutiennes en grève de la faim contre les viols dans leur pays

Djibouti

Pour dénoncer des viols de femmes et l’impunité dans leur pays, neuf Djiboutiennes mènent une grève de la faim depuis une dizaine de jours, en France.

Ces neuf femmes font partie d’une association dénommée Comité des femmes djiboutiennes contre les viols et l’impunité, basée en France. Après des années de lutte sans succès, Fatoumata, Aïcha et leurs camarades observent, depuis le 25 mars 2016, une grève de la faim pour dénoncer les abus sexuels dont sont victimes les femmes dans leur pays. « Ce n’est pas par plaisir que je m’affame », explique Fatou Ambassa, 30 ans, qui jeûne en mémoire de sa cousine, Halima, morte à la suite d’un viol. « Ils étaient plusieurs soldats. Ils l’ont violée devant ses parents. C‘était en 2003, elle avait 16 ans ». Hémorragie, dépression, « elle s’est laissé mourir », dit Fatou qui n’a rien avalé depuis onze jours, à part de l’eau, du jus de pomme et du thé sucré. Vendredi, l’une d’elles, trop affaiblie, a été contrainte par les médecins de se réalimenter.

Dans le local exigu de l’association Femmes solidaires qui les accueille à Arcueil, au sud de Paris, Fatoumata et ses compagnes restent couchées, serrées sur des lits de camp. Leurs voiles multicolores, traditionnels sur les bords de l’océan indien, et leurs visages trahissent la fatigue, mais elles restent déterminées.

Elles sont toutes Afars, une ethnie qui vit dans un vaste triangle à cheval sur l‘Éthiopie, Djibouti et l‘Érythrée. Ces femmes habitaient à Djibouti, dans les régions du nord et du sud-ouest où opère depuis 25 ans la rébellion armée du Front pour la restauration de l’unité et de la démocratie (FRUD), qui combat les forces gouvernementales depuis sa création en 1991. « A l’encontre de ce mouvement armé mais aussi des populations civiles qui le soutiennent ou qui l’entourent, l’armée djiboutienne mène des opérations de représailles », explique Florent Geel, directeur Afrique de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), qui souligne également « des arrestations arbitraires, parfois des exécutions sommaires, mais surtout des violences sexuelles », qui ont pour but « de couper la population civile de la rébellion du FRUD ».

Des accusations récusées par le gouvernement

Ces exactions de l’armée régulière ont poussé plusieurs habitants des Afars à quitter le pays. Certains se sont réfugiés en Europe, notamment en France et en Belgique, comme ces membres du Comité des femmes djiboutiennes contre les viols et l’impunité, dont quatre affirment avoir été violées par des soldats dans leur pays, il y a plusieurs années.

Des « allégations sans aucune crédibilité », selon le gouvernement de Djibouti, petit pays de la corne de l’Afrique stratégiquement situé. Dans une déclaration à l’AFP, un porte-parole du gouvernement a assuré que « depuis 1991, aucune preuve n’a été fournie aux autorités djiboutiennes pour étayer ces affirmations ».

Créé en 1993, le Comité a recensé depuis 246 cas de viols par des militaires. Mais selon Aïcha Dabalé, bien d’autres agressions sexuelles ont été également commises, tout en soulignant des difficultés à rassembler des preuves. « Médecins et avocats refusent de prendre en charge ces femmes, parce qu’elles accusent des soldats », dénonce-t-elle. « Une vingtaine de plaintes ont été déposées, mais aucune n’a abouti ».

Ces femmes continuent de réclamer justice et compte sur la France pour remporter leur difficile combat. « Notre espoir c’est la France », lance Fatou Ambassa, à l’ancienne puissance coloniale qui maintient à Djibouti sa principale base en Afrique. Pour elle, « la France ne peut pas fermer les yeux sur des violations massives des droits fondamentaux ».

De son côté, le gouvernement djiboutien dénonce « une campagne » coordonnée par « l’opposition politique », à l’approche des élections présidentielles du 8 avril, qui verra le président djiboutien Ismaël Omar Guelleh, en poste depuis 1999 briguer un quatrième mandat de cinq ans.

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