Soudan du Sud : Machar à Juba, une première depuis plus de deux ans

Le chef rebelle sud-soudanais Riek Machar a participé mardi à Juba, où il n’avait pas mis les pieds depuis plus de deux ans, à une cérémonie célébrant la signature d’un nouvel accord de paix au Soudan du Sud, dont la mise en œuvre se fait à pas comptés.

M. Machar, qui, aux termes de cet accord, doit retrouver son ancien poste de vice-président, n‘était plus revenu à Juba depuis sa fuite précipitée de la capitale en juillet 2016 après des combats très meurtriers entre ses hommes et les forces gouvernementales.

Le chef du Mouvement populaire de libération du Soudan, en opposition (SPLM-IO), arrivé dans la matinée en provenance de Khartoum, a assisté à cette cérémonie aux côtés de son ennemi intime, le président Salva Kiir.

Les deux rivaux ont signé, sous pression internationale, un accord de paix le 12 septembre à Addis Abeba, censé mettre fin à presque cinq années d’une guerre civile dévastatrice pour le plus jeune pays du monde.

A la faveur de la signature de l’accord de paix, il avait été convenu d’organiser à Juba une cérémonie pour la paix, en présence des chefs d‘État de la région.

Ainsi, les présidents soudanais Omar el-Béchir, somalien Mohamed Abdullahi Mohamed et ougandais Yoweri Museveni étaient présents à Juba, de même que la nouvelle présidente éthiopienne Sahle-Work Zewde.

La cérémonie s’est déroulée au Mausolée John Garang, chef de la guerre d’indépendance contre le Soudan, en présence de plusieurs milliers de spectateurs.

David Shearer, chef de la mission de l’ONU au Soudan du Sud (Minuss), a vu dans la présence des deux camps un “signe public d’unité qui envoie le message fort aux citoyens de ce pays (que ses dirigeants) sont véritablement déterminés à mettre fin aux souffrances et à construire une paix durable.”

On ignorait toutefois mercredi si Riek Machar allait rester à Juba au-delà de la cérémonie : l’un de ses porte-parole, Lam Paul Gabriel, avait fait part mardi à l’AFP de ses craintes concernant sa sécurité.

‘Bâtir la confiance’

En juillet 2016, de violents combats avaient éclaté entre les forces gouvernementales et les troupes rebelles stationnées à Juba pour la protection de Riek Machar, faisant plusieurs centaines de morts.

Le chef rebelle avait alors pris la fuite et gagné à pied la République démocratique du Congo voisine au terme d’une longue marche dans la brousse, avant finalement de s’exiler en Afrique du Sud.

Malgré les réserves sur la sécurité de M. Machar, “la vérité est là: nous sommes pour la paix et ce que nous essayons de faire, c’est de bâtir la confiance”, avait cependant ajouté son porte-parole, précisant que le chef rebelle voyagerait avec une trentaine d’hommes politiques du SPLM-IO et sans soldats.

Ce nouvel accord de paix laisse sceptiques de nombreux observateurs, qui soulignent que faire travailler ensemble MM. Kiir et Machar ne sera pas une mince affaire, leur coopération ayant toujours dans le passé abouti au conflit avant le chaos.

“Le grand défi à l’avenir est de créer la confiance entre les parties, et entre celles-ci et le peuple”, a d’ailleurs reconnu M. Shearer. “Ce n’est pas seulement le travail des signataires. Il nous incombe à nous tous ici aujourd’hui, officiels, membres de la société civile, leaders religieux et la communauté internationale de créer la confiance pour que la paix puisse régner.”

De fait, l’application du nouvel accord connaît des retards sur des points importants comme la réactivation d’une commission conjointe sur les frontières et le nombre des États régionaux, – un des points de contentieux entre pouvoir et opposition – et celle pour l‘évaluation de la mise en œuvre de l’accord de paix.

Des combats ont également été rapportés dans la région de Yei (sud) et dans l‘État pétrolier de l’Upper Nile (Haut Nil, nord), malgré un cessez-le-feu décrété fin juin.

Deux ans et demi à peine après son indépendance, le Soudan du Sud a sombré dans la guerre civile en décembre 2013 à Juba, lorsque M. Kiir, un Dinka, a accusé M. Machar, son ancien vice-président, de l’ethnie nuer, de fomenter un coup d‘État.

Le conflit de pouvoir, marqué par des atrocités à caractère ethnique, a fait plus de 380.000 morts selon une étude récente, et poussé plus de quatre millions de Sud-soudanais, soit près d’un tiers de la population, à s’enfuir.

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AFP

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