Soudan
Khartoum est secouée lundi par les tirs d'artillerie lourde des paramilitaires et de l'armée, assaillie sur plusieurs fronts et qui réclame une nouvelle fois le renfort des civils dans une guerre sans issue après environ trois mois.
Le bruit des combats "a débuté vers quatre heures du matin et ne s'est pas interrompu depuis", rapporte à l'AFP l'un des millions d'habitants encore bloqués dans la capitale soudanaise, sans eau, sans électricité et avec des réserves de vivres et d'argent quasiment à sec.
La guerre sans merci pour le pouvoir qui oppose l'armée dirigée par le général Abdel Fattah aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo a fait depuis le 15 avril près de 3 000 morts et 2,8 millions de déplacés et de réfugiés.
La crise humanitaire se cesse de s'aggraver dans un pays où, avant la guerre déjà, une personne sur trois souffrait de la faim. Elle menace aussi de déstabiliser toute une région à cheval entre le Sahel, la Corne de l'Afrique et le Moyen-Orient, des zones déjà elles-mêmes en prise avec la violence.
Mais les deux belligérants n'ont cessé d'ignorer les appels au cessez-le-feu venus de partout dans le monde. Certains de pouvoir l'emporter militairement, les deux camps refusent d'ouvrir des négociations et préfèrent assurer leur approvisionnement sur le temps long.
L'armée s'est ainsi dite lundi prête à "recevoir et préparer" des combattants volontaires. La question de l'armement des civils, qui plongerait le pays dans la guerre civile, fait débat depuis des semaines.
Le gouverneur du Darfour, région de l'ouest déjà ravagée par la guerre dans les années 2000, puis le général Burhane n'ont pourtant pas hésité tous les deux à appeler à distribuer des armes. Les "jeunes et les hommes qui en sont capables" doivent s'enrôler, a ainsi lancé le chef de l'armée dans son discours à la nation pour la fête musulmane de l'Aïd al-Adha.
Au Darfour, région grande comme la France et frontalière du Tchad, des civils armés ont déjà participé aux combats, de même que des combattants tribaux.
Là-bas, assure l'ONU, la guerre a une "dimension ethnique" et les exactions commises -principalement par les FSR et des milices arabes alliées contre des civils non-arabes - pourraient être des "crimes contre l'humanité".
Dimanche soir encore, les FSR et l'armée se battaient à Nyala, chef-lieu du Darfour-Sud, selon des habitants sur place.
Et le décompte des agressions sexuelles - attribuées par la quasi-totalité des rescapées aux FSR - s'alourdit chaque jour, selon l'organe gouvernemental de lutte contre les violences faites aux femmes.
Les Janjawids, des miliciens arabes qui forment le gros des troupes des FSR, avaient mené sous le commandement du général Daglo la politique de la terre brûlée au Darfour, pillant, violant et tuant des membres d'ethnies non-arabes pour le compte du dictateur Omar el-Béchir, dans les années 2000.
Aujourd'hui sous le feu des critiques, les FSR tentent de donner des gages d'apaisement.
Après avoir annoncé la formation de cours martiales d'urgence, elles annoncent vouloir particulièrement sanctionner "les pillages, le vandalisme et surtout les vols des voitures de civils", alors que des vidéos de combattants faisant sortir de force des familles de leur véhicule inondent les réseaux sociaux.
Les FSR sont aussi accusés du "vol" de maisons et de l'expulsion de leurs habitants. Ces déplacés, parfois sans aucun espoir de retour avec des quartiers entiers rasés à Khartoum et au Darfour, doivent absolument être aidés, plaident les humanitaires.
"Des milliers de familles avec des enfants fuient la violence au Darfour-Ouest" vers le Tchad, rapporte l'Unicef qui a déjà dénombré des centaines d'enfants parmi les victimes de la guerre.
Selon l'Unicef, plus de 13,6 millions d'enfants ont besoin d'aide humanitaire. Et 300 000 d'entre eux pourraient mourir de faim si aucune aide ne leur est apportée.
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