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Africanews Debates | Quels investisseurs pour l’Afrique de demain ?

Quels investisseurs pour l'Afrique de demain ?   -  
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AP Photo - Euronews Debates - Quels investisseurs pour l’Afrique de demain ?

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Alors que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen vient de présenter à Dakar sa nouvelle stratégie d’investissement - le « Global Gateway » - prévoyant 150 milliards d’euros pour alimenter des projets d’infrastructure en Afrique d’ici 2027, face notamment à l’influence de la Chine, Européens et Africains peuvent-ils vraiment réinitialiser leurs relations et prendre un nouveau départ avec des avantages pour les deux parties ?

En amont du 6e sommet Union européenne-Union africaine organisé les 17 et 18 février à Bruxelles, les chaînes Africanews et Euronews se sont mobilisées pour organiser un débat intitulé « Quels investisseurs pour l’Afrique de demain ? »

Quatre panélistes ont participé à notre débat : Nicolas Kazadi, ministre des Finances de la République Démocratique du Congo, Yacine Fal, vice-présidente de la Banque Africaine de développement, Fabrice Le Saché, président, fondateur d'AERA GROUP SAS, vice-président du Medef et Kalaa MPinga, entrepreneur, investisseur, président de la commission agricole du patronat congolais. Un débat animé et modéré par François Chignac, directeur d’Africanews en partenariat avec le Ministère des Finances de la République démocratique du Congo. Voici quelques extraits du débat.

Post-Covid : aider l’Afrique à rebondir

Nicolas Kazadi : Des réponses ont commencé à être données tout au long de cette année qui vient de s’écouler avec des décisions courageuses et vraiment innovantes qui ont été prises notamment au sein du G20 pour financer l’Afrique, je pense à cette réallocation de DTS (Droits de tirage spéciaux du FMI, ndlr) qui est une décision très originale, mais il faut aller encore plus loin tant les besoins sont importants.

On parle d’environ 100 milliards de dollars par an pour rattraper le retard d’investissement, or aucun des partenaires de l’Afrique ne pourra le faire à lui tout seul. Pas même l’Afrique elle-même, donc il faut absolument de la solidarité.

L’Afrique a besoin de l’Union européenne mais aussi d’un partenariat mondial efficace car elle représente l’avenir de l’humanité sur le plan démographique, sur le plan des ressources, sur le plan économique.

Yacine Fal : Il faut d’abord qu’il y ait des programmes et des projets nationaux spécifiques qui soient « bancables », qui s’effectuent dans des environnements stables avec des politiques incitatives pour les investisseurs (continentaux et internationaux).

Il y a le programme continental appelé PIDA (Programme for Infrastructure Development in Africa) sous la houlette de l’Union africaine qui définit les grand projets d’infrastructure prioritaires pour le continent et qui représente cette année 69 projets équivalant à 160 milliards de dollars.

Il y a aussi des programmes de partenariats pour le financement de ces infrastructures. Nous avons par exemple Africa 50, qui est un véhicule de financement qui a été développé sous la houlette de la Banque africaine de développement.

Une Afrique numérique

Nicolas Kazadi : La crise liée à la Covid-19 vient de nous le rappeler de manière très forte, la digitalisation s’impose partout et doit s’accélérer. Evidemment l’Afrique a la plus grande fracture numérique qu’elle doit rattraper et il faut de gros investissements que les acteurs publics historiques n’ont pas été en mesure d’assurer, il faut donc un mix avec les opérateurs privés.

La digitalisation va totalement changer la donne en matière de lutte contre la corruption, les mauvaise pratiques et l’évasion fiscale. La digitalisation est au cœur de toutes nos politiques et à plus forte raison au cœur de notre politique de finances publiques en matière de transparence.

Il y a beaucoup d’expériences qui montrent que la digitalisation peut apporter beaucoup d’inclusion financière.

Kalaa MPinga : Il est clair que la digitalisation permet de créer des conditions financières et un environnement commercial beaucoup plus rapidement qu’il y a une vingtaine d’années.

L’investissement dans les infrastructures reste au cœur du développement et le digital n’est qu’un d’entre eux parce que nous avons un réseau routier qui doit être développé, des infrastructures de logistiques doivent être mises en place et cela reste l’essentiel de ce qui doit être fait.

Yacine Fal : Nous avons plusieurs programmes car la digitalisation est un des leviers pour répondre aux besoins du secteur agricole notamment pour pouvoir le rattacher aux différents marchés et à leurs clients mais aussi renforcer les mécanismes d’inclusion financière grâce au digital.

Cela permet de renforcer les chaînes de valeurs, de sécuriser les transactions et de permettre à tous les acteurs de participer en temps réel dans un environnement qui permet d’accélérer les transactions.

Financer l’Afrique post-COP21

Nicolas Kazadi : Aujourd’hui il est reconnu que la République démocratique du Congo a un rôle majeur à jouer pas seulement en Afrique mais au niveau mondial, c’est pour cela que nous l’appelons pays-solution au niveau environnemental.

On constate dans les faits que les financements (internationaux) prévus ne sont pas à la hauteur de ces ambitions, il faut que l’on trouve pourquoi. Est-ce que c’est une question de capacité d’absorption, de vision ?

Nous devons aller vite car comme je l’ai dit les populations continuent de s’accroître, la pression sur les ressources continue, le temps passe et c’est un enjeu important.

Fabrice Le Saché : Les pays qui sont responsables du réchauffement planétaire aujourd’hui ne prennent pas part au juste financement des projets d’adaptation ou de réduction des émissions ou de séquestration des émissions (de CO2).

On dit qu’il n’y a pas assez de projets (à financer en Afrique). Mais c’est faux, c’est faux, le secteur privé africain a plein de projets. On a un portefeuille de mandats avec 50 projets dans vingt pays.

Les projets sont là : ce qu’il faut maintenant, c’est payer.

Le secteur privé africain ne demande pas l’aumône, il ne demande pas les financements, il demande qu’on paye les output, les résultats.

Aujourd’hui on a un véritable décrochage des entreprises françaises et européennes pour une raison qui est simple : pas de compétitivité des financements, on a été incapables de proposer des packages de financements comme l’ont fait les Chinois ou d’autres pays émergents.

Kalaa MPinga : Ces messieurs (des banques européennes) font aujourd’hui marche arrière car ils sont incapables de gérer les organismes non gouvernementaux qui sont en train de les attaquer tous les jours ce qui rend extrêmement difficile pour nous même dans le secteur privé d’attirer les capitaux parce que les gens ont froid, ont peur.

Il me semble que le monde occidental devrait prendre ses responsabilités et ce n’est pas en décourageant les investisseurs de bonnes volonté qui se lancent dans des endroits où il n’y a parfois aucune entreprise, sans structures où l’Etat.

Je crois que quand on va faire ces grandes promesses de financement il ne faut pas oublier qu’il il faut dire qu’on ne peut pas faire d’omelettes sans casser des œufs. Mais ce n’est pas pour autant qu’on ne peut pas avoir un débat qui ne soit pas responsable.

Nicolas Kazadi : Au-delà de toutes ces bonnes intentions il y a une différence de standard qui fait que si on veut appliquer en Afrique les meilleurs standards européens, cela veut dire en termes clairs qu’on ne peut rien faire avec l’Afrique, il faut qu’on comprenne ça.

Nous ne sommes pas certains, même si l’Union européenne apportait toutes les garanties nécessaires que nous avons aujourd’hui des hommes d’affaire disponibles et disposés à venir investir en Afrique comme d’autres partie du monde ont la possibilité de le faire.

Regardez l'intégralité de ce débat dans le lecteur vidéo ci-dessous:

La finance verte africaine

Yacine Fal : Il faut d’abord que toutes les parties prenantes respectent leurs engagements et le premier déficit de ces engagements c’est celui qui a été pris à Paris pour mobiliser et déployer ces 100 milliards pour l’adaptation au changement climatique.

L’Afrique a été un acteur fondamental tout en étant le plus faible contributeur au gaz à effet de serre et en étant la première victime du réchauffement climatique.

Beaucoup de pays africains ont été les premiers à avoir présenter leur contribution nationale déterminées, à intégrer dans leurs politiques des approches d’intégration d’adaptation au changement climatique dans leurs politiques énergétiques

La Banque africaine de développement est fortement engagée à travers le partenariat avec le Global Consortium on adaptation in Africa pour permettre de mobiliser tous les financements disponibles pour favoriser cette démarche.

Si l’Afrique n’arrive pas à effectuer cette transition de manière juste et ordonnée et bien c’est tout le monde, avec la croissance démographique, qui perdra cette bataille contre le changement climatique et toutes les problématiques dont on a parlé, la migration, les crises sociales et économiques ne feront qu’augmenter.

La jeunesse africaine

Nicolas Kazadi : La question de la jeunesse est le plus grand défi que nous avons. Tout ce que nous faisons c’est pour les humains de demain, dans dix ans, dans vingt ans. Nous sommes la partie du monde la plus jeune. Et donc les jeunes ont leur mot à dire. Il faut qu’on les aide à se lever aujourd’hui sinon demain, comme on dit ils se soulèveront.

Et voilà pourquoi la solidarité est absolument importante. C’est aussi un enjeu pour la paix non seulement pour l’Afrique mais aussi au niveau mondial.

Yacine Fal : L’esprit entrepreneurial des Africains est connu et innovant et donc il faut mettre en place des systèmes nationaux, régionaux et internationaux qui permettent d’offrir de nouvelles possibilités d’accès aux financements, d’accompagnement en termes de compétences et d’aider les marchés.

Il faut des solutions intégrées pour faciliter l’entreprenariat des jeunes et des femmes en particulier… afin de permettre à ces jeunes de pouvoir réaliser des projets importants pour eux mais aussi pour réduire significativement cette migration et ce nombre de jeunes qui sont perdus pour le continent alors que celui-ci peut leur permettre d’envisager les mêmes possibilités que celles envisagées en traversant la Méditerranée par exemple.

Kalaa MPinga : Nous avons beaucoup parlé de haute technologie en rapport au secteur financier mais je suis surpris par le manque d’initiative pour utiliser cette technologie pour promouvoir l’éducation dans les endroits éloignés parce que c’est bien beau de vouloir utiliser de l’argent par téléphone mais je pense que ce serait essentiel si on pouvait justement utiliser cette infrastructure technologique pour enseigner.

Nicolas Kazadi : Ce que je souhaite c’est que l’Europe joue un rôle plus important qu’elle ne joue aujourd’hui parce qu’on voit ce rôle se réduire d’année en année pour toutes les raisons qu’on a évoquées ici et qui à mon avis n’ont pas de raison d’exister.

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