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Présidentielle à Bissau : l'armée se cantonne hors de l'arène politique

Présidentielle à Bissau : l'armée se cantonne hors de l'arène politique

Guinée-Bissau

Après avoir été mêlée à plusieurs assassinats politiques et coups d’Etat depuis l’indépendance, l’armée de Guinée-Bissau s’est muée en institution “républicaine”, selon des analystes qui jugent faibles les risques qu’elle intervienne lors du second tour de la présidentielle dimanche.

“Si je suis élu, je maintiendrai l’actuel chef d‘état-major à son poste. Cet homme a réussi à faire de notre armée une armée républicaine”, a promis l’un des deux finalistes, l’opposant et général de réserve Umaro Sissoco Embalo, lors du débat qui l’opposait jeudi à son adversaire, Domingos Simoes Pereira, chef du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC).

Depuis son indépendance du Portugal en 1974, ce petit pays d’Afrique de l’Ouest de 1,8 million d’habitants a connu quatre coups d’Etat et une quinzaine de tentatives de putsch. Le président sortant, José Mario Vaz, est le premier à terminer son mandat depuis 1998 sans être destitué ou tué.

La hiérarchie militaire, réputée corrompue et mêlée au trafic de cocaïne en provenance d’Amérique du Sud, a longtemps considéré détenir une légitimité historique tirée de son rôle pendant la guerre de libération.

Mais elle ne pense plus “à fomenter des coups d’Etat” et ne se mêle plus de politique, a assuré juste avant le 1er tour en novembre le général Biague Na Ntam, qui la dirige depuis 2014.

Pour preuve, l’armée est restée à l‘écart des vicissitudes de la vie politique pendant le mandat du président Vaz, élu en 2014, qui a vu huit Premiers ministres se succéder et le PAIGC se déchirer.

‘Retirer leurs treillis’

Les militaires auraient eu des “raisons d’intervenir, mais ils ne l’ont pas fait. On pense qu’elle (l’armée) va continuer à rester neutre”, estime l’analyste politique Thierno Diallo.

La dernière intervention de l’armée dans l’arène politique remonte à 2012, lors du renversement du Premier ministre d’alors, Carlos Domingos Gomes, entre les deux tours d’une présidentielle dont il était le favori.

L’Ecomib, une force de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), est depuis lors déployée dans le pays. Bien visible dans les rues de la capitale Bissau, elle n’a pas dû intervenir lors d’une campagne électorale, épargnée par les violences, qui s’est déroulée dans une ambiance de carnaval.

Le général Na Ntam a prévenu pendant la campagne pour le second tour: “Les militaires qui veulent faire de la politique n’ont qu‘à retirer leur treillis”, une allusion à des officiers soupçonnés d’appuyer la candidature du chef du PAIGC.

“Les soldats sont tranquilles. J’espère que ça va continuer mais on verra après la proclamation des résultats”, attendus la semaine prochaine, a déclaré samedi à l’AFP un membre de la mission d’observation électorale de l’Union européenne, optimiste mais prudent.

Malgré les garanties de la haute hiérarchie militaire, “il y a un risque que des soldats d’en bas ne l’entendent pas ainsi, en particulier de la part d‘éléments incontrôlés et de certaines couches intermédiaires (d’officiers) mécontents” de leur situation, souligne l’analyste Thierno Diallo.

Effectifs pléthoriquesLa Cédéao a plusieurs fois menacé d’intervenir contre toute tentative de remise en cause du scrutin présidentiel par la force.

“Dans nos pays, un coup d’Etat ne peut plus prospérer, ou sa durée de vie est limitée à 30 ou 60 jours au maximum”, a dit, avant la proclamation des résultats du premier tour, le commissaire chargé des Affaires politiques et de Sécurité de l’organisation régionale, Francis Behanzin.

“Nous avons une force d’attente. Nous interviendrons comme nous sommes intervenus par ailleurs pour rétablir l’ordre”, a-t-il ajouté.

La réforme annoncée depuis des années des forces de défense et de sécurité, qui vise notamment à améliorer les conditions matérielles et financières d’une armée aux effectifs jugés pléthoriques, qu’il faudrait ramener à un niveau compatible avec les moyens de l’Etat, est jusqu’ici restée lettre morte.

Pour Domingos Simoes Pereira, le maintien à sa tête du général Ntam, “dépend des réformes nécessaires à apporter (en son) sein”.

Le pays compte officiellement près de 5.000 soldats, mais ils seraient en réalité deux à trois fois plus nombreux, selon un rapport d’experts publié en 2018 à la demande de l’Etat.

Cela fait de la Guinée-Bissau le pays d’Afrique de l’Ouest où le ratio de militaires par habitants est le plus élevé, se chiffrant à 4 à 5 pour 10.000 habitants, contre une moyenne régionale de 1,5 à 2, selon le même rapport.

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