Guinée-Bissau
Le candidat du parti historique et dominant en Guinée-Bissau est arrivé nettement en tête du premier tour de la présidentielle, offrant une perspective de cohésion cruellement nécessaire dans un pays miné par la pauvreté et l’instabilité.
Domingos Simoes Pereira, 56 ans, chef du gouvernement en 2014-2015, devance largement, avec 40,13% des voix, un autre ancien Premier ministre, Umaro Sissoco Embalo, 47 ans, Premier ministre entre 2016 et 2018, selon les résultats communiqués mercredi par la Commission nationale électorale.
M. Embalo, avec 27,65% des suffrages, est loin derrière M. Pereira avant le second tour prévu le 29 décembre.
La question est cependant de savoir si les adversaires de M. Pereira le laisseront capitaliser sur son avantage ou s’uniront contre lui et son parti, le PAIGC (Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert), qui dispose au parlement d’une majorité relative issue des législatives de mars 2019. M. Embalo a, lui, l’investiture d’une dissidence du PAIGC, le Madem.
Ce sont donc deux produits du système qui sont appelés à concourir à la succession du président José Mario Vaz, élu en 2014 et à nouveau candidat en 2019. Il est arrivé seulement quatrième dimanche, avec 12,41% des voix, d’un premier tour jugé régulier par les observateurs étrangers et nationaux.
Or M. Vaz est à couteaux tirés avec M. Pereira, qu’il avait limogé en 2015 de son poste de Premier ministre. Les spéculations vont bon train sur le ralliement d’autres candidats derrière M. Embalo contre M. Pereira.
La stabilité de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest de 1,8 million d’habitants en état de crise politique quasiment permanente est un des enjeux majeurs de l‘élection. Elle est indispensable aux réformes nécessaires pour combattre les maux qui affligent cette ancienne colonie portugaise comme la grande pauvreté, la corruption répandue jusque dans les classes dirigeantes et le trafic de cocaïne en provenance d’Amérique du Sud.
Transparence du scrutin
Depuis son indépendance conquise de haute lutte sur le Portugal en 1974, le pays tropical coincé entre Sénégal, Guinée et océan Atlantique, melting-pot humain, majoritairement musulman, avec une forte minorité chrétienne et une multitude d’ethnies et de langues locales, a connu quatre coups d’Etat, seize tentatives et une valse continue de Premiers ministres.
Après le dernier putsch en 2O12, l‘élection de M. Vaz en 2014 marquait le retour à l’ordre constitutionnel et devait briser le cycle des changements de gouvernement à un rythme quasiment annuel. En réalité, les Premiers ministres, dont MM. Pereira et Embalo, se sont succédé au gré de turbulences qui ont persisté jusqu’au bout.
Deux semaines avant la présidentielle, la communauté internationale, forcée à une médiation constante, s’inquiétait encore d’une remise en question de l‘élection et même de “risques de guerre civile”.
La présidentielle s’est tenue sans incident majeur sous la surveillance des observateurs étrangers et nationaux. Malgré des accusations de bourrage des urnes proférées par le camp du président sortant et quelques manquements comme des ouvertures tardives de bureaux ou des absences localisées d’encre, la Commission électorale et les autres missions d’observation ont jugé que le premier tour s‘était joué à la régulière.
Mais, instruites par le passé, les organisations internationales ont appelé chacun à respecter le scrutin des urnes. La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), partenaire et médiatrice historique de l’entreprise démocratique dans ce pays à l’histoire chaotique, a ouvertement menacé d’actionner la force de quelques centaines de soldats et policiers (Ecomib) déployée dans le pays après le coup d’Etat de 2012, en cas de tentative visant à inverser autoritairement le verdict des urnes.
L’armée s’est engagée à ne plus se mêler de politique, sept ans après le coup d’Etat qui avait interrompu le processus électoral.
Mais un dispositif de sécurité exceptionnel a été mis en place autour de l’hôtel où ont été annoncés les résultats. Des agents de la police d’intervention rapide, de la garde nationale appuyés par des éléments de l’Ecomib étaient partout visibles.
AFP
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