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Inspire Middle East, le business juteux des "influenceurs" au Moyen-Orient

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Au programme de ce numéro d’Inspire Middle East, une série de reportages au Moyen-Orient :

  • Salim Essaid a enquêté sur l‘émergence des “influenceurs” aux Emirats Arabes Unis et dans tout le Moyen-Orient, et sur la manière dont ils gagnent leur vie grâce à leurs publications.
  • Daleen Hassan a rencontré Karim Wasfi, un violoncelliste irakien qui utilise la musique pour rassembler les communautés touchées par la guerre.
  • Enfin, Inès Mathlouthi s’est intéressée aux tatouages en Tunisie, un art pratiqué depuis longtemps par les communautés berbères, mais qui reste tabou aujourd’hui. Un jeune tatoueur compte bien changer le regard de la société tunisienne.

Le business juteux des influenceurs

Etre un “influenceur”, qu’est-ce que cela signifie réellement ? Pour Alanoud Badr, une styliste saoudienne, c’est avant tout une question d’impact.

La jeune femme s’est fait connaitre avec son blog, qui a repoussé les barrières de la mode en Arabie Saoudite. En 2011, elle a lancé sa marque Lady Fozaza, depuis les Emirats Arabes Unis.

C’est sa silhouette menue qui a poussé Alanoud Badr à confectionner les blazers emblématiques de sa marque, qui mettent en valeur les épaules. Ces vestes ont attiré l’attention de célébrités comme Lady Gaga ou Kim Kardashian. Désormais, Lady Fozaza a près de 750 000 abonnés sur Instagram.

Plusieurs marques ont été séduites par la relation qu’entretient Alanoud avec ses fans. Elles ont donc cherché à embaucher la styliste, pour qu’elle porte leurs vêtements.

“Ils se sont dit : si elle a une relation spéciale avec ses abonnés, alors tout ce dont elle parlera aura une résonance. Si elle fait la promotion d’une marque, ils l’adopteront, ils en parleront. Cela vaut de l’argent”, résume Alanoud Badr.

Les grandes marques sont confrontées à un nouveau problème : l’embauche d’influenceurs très suivis, mais qui ne respectent pas leurs engagements. Certains comptes sont même faux, ou inactifs.

Pour réglementer le « marketing des médias sociaux », les Émirats ont créé des licences pour les influenceurs rémunérés, comme l’explique le directeur du Conseil national des médias, Naser Al Tamimi : “C‘était plutôt chaotique, avant que la décision soit rendue. Maintenant, il y a un processus organisé. Les gens connaissent leurs droits et leurs devoirs. Et les entreprises aussi.”

1 700 licences ont été octroyées jusqu’à présent. Elles coûtent environ 4 000 dollars par an. Pour en faire la demande, il faut avoir 21 ans minimum, et être titulaire d’un baccalauréat. Mais en rejoignant une agence, les influenceurs peuvent réduire leurs coûts et travailler sous la licence de l’entreprise.

Ashley Cadzow dirige l’une de ces agences. D’après lui, la région possède certains des influenceurs les plus chers du monde, avec des transactions allant de 3 000 à 100 000 dollars.

Cette région est considérée comme un marché inexploité, alors les marques n’hésitent pas à payer le prix fort pour atteindre les clients potentiels : “Je suis constamment en réunion avec des marques, qui me demandent “Comment peut-on parler à l’Arabie Saoudite ? A l’ensemble des pays du Golfe ? La réponse, ce sont les influenceurs “, conclut Ashley Cadzow.

Combattre la terreur grâce à la musique

Quelle est l’arme la plus efficace contre le terrorisme ? Pour Karim Wasfi, c’est incontestablement la musique. Il y a quelques années, ce violoncelliste irakien a quitté les salles de concert pour se rendre dans des endroits sinistrés.

Il a débuté par Mossoul, où en 2017, l’autoproclamé Etat Islamique a fait exploser la mosquée Al-Nuri et son minaret vieux de 850 ans. Au lieu de se recueillir silencieusement, Karim Wasfi a choisi de ramener le lieu à la vie, grâce à sa musique. Depuis, l’ancien chef d’orchestre s’est produit sur près de 25 sites à travers le pays.

Sa campagne “Musique for peace” a pour objectif de lutter contre les groupes terroristes comme l’organisation Etat Islamique, qui a opprimé la population pendant plus de 6 ans. Armé d’un archet et d’un violoncelle, il lutte grâce à des compositions originales. Et avec ses sérénades, il donne aux Irakiens la force d’aller de l’avant.

“C‘était un message pour encourager les gens à continuer, pour encourager l‘être humain qui est en nous à continuer, à être connecté aux autres, à rester attaché à la vie. Le faire sur place, cela revenait à transformer chaque élément de la vie en un théâtre, et à agir contre la radicalisation et contre la terreur”, raconte le violoncelliste.

Pour Karim Wasfi, la musique peut devenir une véritable arme : “Elle favorise la prise de décision, elle renforce les fonctions cérébrales, la créativité. Elle a un impact global sur la société.”

Malgré les conditions de vie difficiles, le musicien reste optimiste quant à l’avenir de la scène musicale et culturelle en Irak. Selon lui, la culture ne mourra jamais dans son pays natal, ni même dans toute la région du Moyen-Orient. “Nous avons une riche histoire de partage de culture entre les civilisations et ça continue, explique le violoncelliste. Il y a un cycle de civilisations et l’impact de la politique est limité. J’ai l’habitude de dire que, quand cette région n’aura plus de pétrole, nous pourrons inonder le monde entier de culture.”

Avec sa fondation “Peace Through Arts”, lancée en 2007, Wasfi entend avoir un impact durable, même après la chute de groupes terroristes comme l’Etat Islamique. Il espère un jour se produire en Syrie, un pays qui, selon lui, partage les luttes de sa terre natale.

Le tatouage, un art ancestral et tabou en Tunisie

L’Ecole Nationale de Tatouage a ouvert ses portes à Tunis en janvier, et il s’agit du seul institut de ce genre en Afrique du Nord. Il a été fondé par Fawez Zahmoul, qui se bat pour que le métier de tatoueur soit mieux considéré dans le pays.

Cet ancien ingénieur de 35 ans s’est lancé dans le tatouage en 2006, alors qu’il vivait au Maroc. C’était à l’origine un simple moyen de gagner un peu plus d’argent. Il lui a fallu six ans pour maîtriser cet art complexe et maintenant, il possède le seul salon de tatouage légal en Tunisie.

“J’ai fondé cette école car je sentais qu’il était temps de transmettre mon savoir à d’autre passionnés de tatouages”, raconte Fawez Zahmoul.

L’enseignement au sein de l’Ecole nationale de tatouage dure 6 mois. Les étudiants âgés de 19 à 30 ans y apprennent tous les aspects du métier, y compris les règles sanitaires.

Les frais de scolarité coûtent 1400 dollars, et à la fin du cursus, les étudiants obtiennent un certificat d‘études supérieures qui leur permet de travailler de façon professionnelle.

Fatma Charfy, 23 ans, est l’une des élèves de Fawez Zahmoul. Elle a étudié les arts graphiques à l’Université, mais a changé de voie il y a 3 ans. “Je suis venue ici pour apprendre et obtenir mon diplôme comme ça, je pourrai ouvrir mon propre salon de tatouage”, explique la jeune femme.

L‘école de tatouage suit les règles strictes du ministère de la Santé, pour assurer la sécurité des élèves et de leurs futurs clients. “Un tatouage semble simple, mais il peut entraîner des complications pour la santé, estime Taha Zinelabidine, inspecteur au sein du ministère de la Santé. Il doit donc faire l’objet d’un examen constant par le ministère, via des mesures de conservation de la santé. Nous ne sommes pas contre cette école, mais il est important qu’elle respecte les règles.”

La Tunisie abrite également une forme ancienne de tatouage connue sous le nom de “El-wcham”, et historiquement pratiquée par les Berbères. Ces derniers utilisent une encre noire naturelle à base de plantes, qui prend une couleur verte au fil des ans.

Des symboles de pureté ou de fertilité étaient généralement gravés sur les visages et le haut du corps des femmes Berbères, mais cette tradition, autrefois commune, a pratiquement disparu aujourd’hui.

L’artiste Manel Mahdouani s’est spécialisée dans ces tatouages traditionnels. Elle se rend régulièrement dans les villages de la région pour tenter d’en savoir plus sur ces dernières coutumes.

“Pour que la tradition se perpétue, à chaque fois que je rencontre une femme tatouée, j’essaie de lui parler et de comprendre pourquoi elle a ces tatouages, de prendre une photo si elle me le permet, témoigne la tatoueuse. J’essaie de rassembler ces images et ces informations et peut-être que dans 5 ans, je sortirai un livre ou une archive contenant tous les symboles que j’ai appris.”

Les tatouages séduisent de plus en plus en Tunisie, notamment la jeune génération. Beaucoup espèrent que l’Ecole nationale de tatouage permettra une plus grande reconnaissance de cet art au sein de la société.

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