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Côte d'Ivoire : la ''presse sinistrée", les journalistes s'insurgent

Côte d'Ivoire : la ''presse sinistrée", les journalistes s'insurgent

Côte d'Ivoire

Les journalistes Ivoiriens sortent de leur silence et fustigent les autorités de leur pays, qu’ils accusent de délaisser la presse. Dans cet article, le cri de cœur des hommes de presse d’un pays qui, jusqu‘à ce jour et malgré son avancée économique régionale, ne connaît toujours pas la véritable libéralisation de la presse qui continue de se faire attendre. Explications.

Ce ne sont pas les superlatifs qui manquent chez nos collègues Ivoiriens pour crier leur colère et amertume. Ce mardi, à Abidjan (capitale économique de la Côte d’Ivoire, NDLR), les candidats au très convoité poste de président de l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire (UNJCI) ne se sont pas fait prier pour affirmer que la “presse ivoirienne est sinistrée”, demandant par la même occasion davantage d’aides de la part de leur pays.

Dans cette lancée, Jean-Claude Coulibaly, journaliste au quotidien Le Patriote (journal pro-RDR, le parti du président Alassane Ouattara, NDLR) met le pied dans le plat : “La presse ivoirienne est la grande malade de la République, nos salaires hypothéqués et hypothétiques (…) La tendance à la baisse au niveau des ventes et des ressources publicitaires se poursuit.”

Coulibaly creuse encore plus, redoutant la “fermeture des journaux” et laissant entendre, comme un avertissement, qu’‘‘Un journaliste mal payé est un danger pour la République”.

Même situation et donc, même son de cloche du côté de Franck Ettien, lui aussi journaliste : “La situation est critique. La presse ivoirienne va mal au regard des chiffres de ventes et du désintérêt du public. Des journaux tirent 30.000 exemplaires et en vendent moins de 6.000.”

Mais Ettien veut tout de même équilibrer les responsabilités. Pour lui, l’Etat et les journalistes se les partagent et il ajoute même que les derniers cités doivent “se bonifier”. En clair et en plus simple, les journalistes Ivoiriens doivent améliorer leur niveau.

Pour Lance Touré du quotidien Le Nouveau Réveil (journal pro-PDCI, le parti de l’ex-président Bédié, NDLR), “un plan d’urgence de sauvetage’‘ est de mise ‘‘car la situation est difficile”.

Les journalistes Ivoiriens revendiquent tout un chapelet de mesures. Entre autres, une subvention annuelle de l’ordre d’environ 9,1 millions d’euros. Pour eux, cette somme d’argent leur permettra de “stabiliser (leurs) rédactions et garantir les salaires”. Cette mesure est d’ailleurs en vigueur au Sénégal (5,4 millions d’euros), au Burkina Faso voisin de la Côte d’Ivoire (1,6 million d’euros) et aussi au Ghana, lui aussi pays limitrophe (6,1 millions d’euros).

Jean-Claude Coulibaly se veut clair, martelant que cette initiative est un devoir de la part de l’Etat ivoirien : “Ce n’est pas de l’aumône, mais un droit du public à l’information, une fonction régalienne de l’Etat et une exigence constitutionnelle.”

Quand la politique pollue le journalisme

La presse ivoirienne dans son ensemble est en effet dans le rouge, la presse écrite étant la moins enviable. Pour preuve, le très puissant et très riche quotidien pro-gouvernement Fraternité Matin, qui réalise les plus gros tirages, a dû mettre à la porte environ la moitié de son personnel en 2018. Cela, dans le souci d’apporter de l’oxygène à ses finances.

Mais la presse ivoirienne a un autre problème et non des moindres : elle est impliquée dans le débat politique jusqu‘à laisser de côté les bases même de l‘éthique et de la déontologie qui caractérisent le noble métier de journaliste. Ce qui la rend très souvent peu crédible, limitant sa capacité à diffuser le vrai.

Cette triste réalité s’est parfaitement vérifiée lors de la crise armée qui a ébranlé la Côte d’Ivoire de 2002 à 2011. Durant cette période sombre du pays, des médias se sont violemment illustrés dans le but de défendre les intérêts de leurs mentors politiques respectifs, la presse écrite s‘étant montrée la plus zélée en la matière. Et, chose évidente, la qualité de l’information en avait gravement fait les frais.

Autre obstacle, le manque de volonté politique pour une véritable libéralisation de la presse ivoirienne, notamment en ce qui concerne l’audiovisuel. En effet, les autorités Ivoiriennes se succèdent sans jamais réellement se décider à doter les stations de radio existantes d’un cahier de charge qui leur permettrait de traiter les informations à caractère politique en toute liberté.

Autre fait, les radios ivoiriennes ont souvent pour personnel des jeunes animateurs mal payés, mal formés et l’amalgame se fait le plus souvent lorsqu’il s’agit de faire le part entre journalistes et ceux qui ne le sont pas. Quant aux chaînes de télévision privées 100% ivoiriennes, elles se font toujours attendre et ce ne sont pas les déclarations de bonne foi qui manquent chez les politiques pour annoncer leur venue.

Quant à ce qui concerne le cahier de charge de ces futures chaînes de télévision, l’on assistera peut-être au même scénario que celui des stations de radio.

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