Soudan
Face à la persistance des manifestations, le président soudanais a durci le ton lundi en interdisant ce type de rassemblement, mais les organisateurs de la contestation ont appelé le peuple à descendre de nouveau dans la rue.
Après avoir instauré vendredi l‘état d’urgence dans tout le pays, le chef de l’Etat soudanais, qui fait face au plus sérieux défi depuis son arrivée au pouvoir il y a 30 ans, a décrété que seules les manifestations autorisées par les autorités seront tolérées.
Dans le cadre des mesures liées à l‘état d’urgence, il a aussi précisé avoir autorisé les forces de sécurité à mener des raids dans des bâtiments “où sont menés des activités suspectes” ainsi que des fouilles corporelles.
Il a également banni “la publication ou l‘échange y compris sur les réseaux sociaux d’informations portant atteinte à l’Etat ou aux citoyens”.
Ceux qui violeraient ces dispositions encourent jusqu‘à 10 ans de prison, a précisé la présidence qui a fait des annonces après que des centaines de manifestants sont descendus dans les rues lundi, malgré l‘état d’urgence décrété vendredi.
Le principal groupe organisant la contestation, l’Association des professionnels soudanais, s’est immédiatement montré défiant.
“Nous appelons notre peuple dans la capitale, dans tous les Etats (provinces), toutes les villes et tous les villages à descendre dans la rue maintenant pour exprimer leur rejet des nouvelles mesures d’urgence annoncées par le chef du régime”, a lancé dans un communiqué cette association qui fait partie d’une Alliance pour la liberté et le changement (ALC).
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Plus tôt dans la journée, avant les annonces du président el-Béchir, des centaines de personnes rassemblées dans la capitale Khartoum avaient scandé “liberté, paix, justice”, le slogan de la contestation, selon des témoins. La police a tenté de les disperser en tirant des gaz lacrymogènes.
Un peu plus tard, des manifestations ont eu lieu dans d’autres quartiers de la capitale, Burri, Shambat et Al-Deim, selon des témoins.
“Nous défions le régime et nous n’avons pas peur de l‘état d’urgence”, a clamé Erij, une manifestante qui n’a indiqué que son prénom pour des raisons de sécurité. “Nous n’avons qu’un seul objectif, c’est de pousser le président à quitter ses fonctions”, a-t-elle poursuivi.
A Omdourman, ville jumelle de Khartoum, la police a tiré des gaz lacrymogènes dans l’enceinte de l’université pour femmes Ahfad, où des étudiants ont organisé un rassemblement lundi.
Le Soudan est depuis le 19 décembre le théâtre de manifestations quasi quotidiennes déclenchées par la décision du gouvernement de tripler le prix du pain, dans un pays en plein marasme économique.
La contestation s’est vite transformée en un mouvement réclamant le départ de M. Béchir, 75 ans, qui tient le pays d’une main de fer depuis un coup d’Etat soutenu par les islamistes en 1989 et envisage de briguer un troisième mandat en 2020.
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Lors d’une réunion à New York du Conseil de sécurité, les Etats-Unis ont exhorté Khartoum “à mettre un terme immédiat à la répression violente de manifestations pacifiques”.
“Nous sommes vivement préoccupés par la déclaration d‘état d’urgence”, a ajouté le représentant américain à l’ONU, Jonathan Cohen, à l’unisson de plusieurs Etats européens, comme l’Allemagne, membre actuellement du Conseil de sécurité.
“Plutôt que de renforcer les forces de sécurité pour contrer les manifestations, ce qu’il faut ce sont des mesures (…) pour répondre aux griefs légitimes de la population”, a insisté M. Cohen.
Au-delà de la baisse des subventions du pain, le Soudan, amputé des trois quarts de ses réserves de pétrole depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, est confronté à une inflation de près de 70 % par an et fait face à un grave déficit en devises étrangères.
Le puissant Service national du renseignement et de la sécurité (NISS) a arrêté depuis décembre des centaines de manifestants, leaders de l’opposition, militants et journalistes, d’après des ONG.
Selon un bilan officiel, 31 personnes sont mortes depuis le 19 décembre. L’ONG Human Rights Watch (HRW) évoque le chiffre de 51 morts.
Rejetant les appels à sa démission, M. Béchir a toutefois opéré des changements dans les hautes sphères du pouvoir en limogeant le gouvernement.
Défiant la communauté internationale, il a également remplacé son adjoint à la tête du parti au pouvoir par Ahmed Haroun, visé par un mandat d’arrêt pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité de la Cour pénale internationale (CPI) pour son rôle présumé dans le conflit au Darfour.
AFP
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