Guinée
L’ambassadeur de Russie en Guinée a déploré le “principe d’alternance” inscrit dans la Constitution, dont il a suggéré la modification pour permettre au président Alpha Condé de briguer un troisième mandat, provoquant des protestations de l’opposition et de la société civile.
Ancien opposant historique et premier président démocratiquement élu de cette ex-colonie française d’Afrique de l’Ouest régie jusqu’alors par des pouvoirs autoritaires, voire dictatoriaux, Alpha Condé, dont le second mandat s’achève en 2020, a souvent contesté la pertinence de la limitation du nombre de mandats en Afrique.
“Malheureusement, le principe d’alternance, qui domine beaucoup de Constitutions dans le monde (mais pas toutes, heureusement) impose la mentalité de revanche”, a déclaré l’ambassadeur Alexandre Bregadzé, s’exprimant en tant que doyen du corps diplomatique qui présentait ses voeux de Nouvel An à M. Condé mercredi.
“Mais pourquoi si, en général, tout va bien et que la perspective est bonne?”, s’est interrogé le diplomate, en dressant un portrait très flatteur du bilan d’Alpha Condé, selon le texte de son intervention transmis par la présidence guinéenne.
“Les Constitutions ne sont pas des dogmes, ni Bible, ni Coran”, a-t-il affirmé, en estimant que ce sont les Constitutions qui doivent “s’adapter à la réalité” et non l’inverse. “On ne change pas les chevaux au passage d’une rivière”, a encore insisté M. Bregadzé.
Réactions de l’opposition et de la société civile
Le principal parti d’opposition, l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), s’est élevé contre ces déclarations, pressant les autres ambassadeurs de s’en “désolidariser”.
“L’ambassadeur russe doit savoir qu’il n’est pas du rôle d’un ambassadeur de se mêler des problèmes internes d’un pays indépendant”, a réagi jeudi Fodé Oussou Fofana, vice-président de l’UFDG, estimant que le représentant de Moscou n’aurait jamais tenu ces propos sans l’aval du président guinéen.
“Nous demandons aux ambassadeurs de la Grande-Bretagne, de la France, des États-Unis et autres, de se démarquer de ses propos à travers une déclaration, sans aucune ambiguïté”, a-t-il ajouté.
L’ambassadeur “n’a pas à s’immiscer dans les affaires internes de la Guinée”, a abondé Faya Millimouno, qui dirige le Bloc Libéral (BL, opposition).
Le leader du “Balai citoyen”, Sekou Koundouno, une association de la société civile opposée à un troisième mandat d’Alpha Condé, a dénoncé l’intervention du diplomate russe, qualifiée de “discours incohérent, illogique, inapproprié et anticonstitutionnel”.
AFP
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