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Guinée équatoriale : la torture, pratique courante selon des témoins et des ONG

Guinée équatoriale : la torture, pratique courante selon des témoins et des ONG

Guinée équatoriale

Des militants d’un parti d’opposition dissous en février en Guinée équatoriale affirment avoir été “torturés”, pratique confirmée par des défenseurs des droits de l’homme, mais fermement démentie par le pouvoir à Malabo.

C’est à “Guantanamo”, surnom du commissariat central de Malabo que plusieurs des 38 militants du parti d’opposition Citoyens pour l’innovation (CI) disent avoir subi des mauvais traitements, du 28 décembre au 3 janvier, selon des témoignages recueillis par l’AFP.

Les faits ont eu lieu juste après l’annonce faite par le gouvernement qui annonçait avoir déjoué le 24 décembre, une tentative de coup d‘état dont les commanditaires étaient des équato-guinéens et les exécutants des étrangers, parmi lesquels des Français, selon Malabo. Des militants de CI avaient été arrêtés après une tentative de rassemblement début novembre.

“Nous avons été torturés pendant une semaine”, affirme Ernesto Obama Ondo, 42 ans, militant de CI. “Je recevais 150 coups de fouet chaque jour” affirme-t-il, ajoutant : “Mes fesses étaient en lambeaux”.

Mireille Buila Euka, 24 ans, jeune membre de CI, a également reçu des coups de fouet après avoir été attachée par les mains et les pieds : “J’en ai reçu 100 coups la première nuit” en détention.

Ernesto Obama Ondo dit avoir été finalement emmené à l’hôpital La Paz de Malabo, comme d’autres victimes, information confirmée à l’AFP par des employés de l’hôpital.

C’est là que Susana Esono, la trentaine, affirme avoir subi une tentative d’assassinat. Elle y avait été emmenée après avoir eu un bras cassé et une côte fracturée à coups de barre de fer lors de son arrestation le 28 décembre.

“Après deux jours à l’hôpital La Paz, un homme (…) m’a fait une injection et je me suis évanouie”, dit-elle. Alors qu’elle était encore sous perfusion, des “policiers” sont venus la chercher pour la conduire à “Guantanamo” où ils lui ont arraché la perfusion en disant “que les gens de CI doivent mourir, qu’ils n’ont pas droit au traitement”.

Selon M. Obama Ondo et le parti CI, un autre opposant, Santiago Ebee Ela, “est mort sous la torture” en détention mi-janvier.

Accusations démenties par le pouvoir de Malabo

“Ce n’est pas vrai (…), je pense qu’il était malade”, avait affirmé à l‘époque le président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema, promettant une enquête sur les circonstances de son décès qui n’a pas encore commencé, selon l’avocat équato-guinéen Fabian Nsue et Amnesty International.

“Les militants de CI ont été torturés, nous envisageons une action en justice”, a déclaré Me Nsue doutant qu’elle aboutisse ; la justice étant selon lui liée au gouvernement dont l’objectif est “d’en finir avec CI”.

Saisie, l’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW) souhaiterait que l’ONU mène une enquête, a indiqué la chercheuse Sarah Saadoun. “Je suis en train de faire de plus amples recherches” pour une plainte devant l’ONU, déclare Tutu Alicante, Équato-guinéen en exil et collaborateur de HRW.

Début février, l’Union européenne s’est inquiétée de la “forte détérioration de la situation des droits de l’homme” en Guinée équatoriale, tout comme Amnesty International.

“Depuis les élections législatives et municipales de novembre 2017, nous avons constaté une augmentation du nombre de cas de torture de membres de l’opposition”, déclare à l’AFP Marta Colmer, chercheuse à Amnesty.
Mais le “refus de collaborer” des autorités équato-guinéennes rend difficile la vérification “des violations des droits de l’homme dans ce pays”, explique-t-elle.

Arrêtés pour ‘‘trouble à l’ordre public’‘

“Qui est torturé ?”, se demande l’ambassadeur de Guinée équatoriale en France, Miguel Oyono Ndong Mifumu. “Les gens qui ont été arrêtés ne l’ont pas été parce qu’ils étaient membres d’un parti politique”, affirme-t-il.

Ils l’ont été pour “sédition, désordre public, atteintes à l’autorité et blessures graves” suite à des échauffourées survenues le 5 novembre pendant la campagne pour le scrutin du 12 novembre à Aconibe, sur la partie continentale de la Guinée équatoriale.

“Un groupe de 200 personnes” a “tabassé (…) des policiers”, a ajouté l’ambassadeur, comparant les militants de CI à “des paramilitaires”.

La police avait empêché la tenue d’un meeting de campagne du CI à Aconibe, ville natale du leader du parti, Gabriel Nse Obiang Obono. Trois policiers avaient été blessés et leurs armes de service arrachées.

Fin février, CI a été dissous et 147 de ses militants jugés sur la base des événements d’Aconibe, dont 21 condamnés à plus de trente ans de prison. 31 militants sont encore en détention, selon CI, dont son unique député, Jésus Mitogo.

Le parti affirme que lors de leur procès mi-février, une trentaine d’accusés ne pouvait pas se tenir debout “en raison de la torture subie” pendant leur détention “à Guantanamo”.

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