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Congo : la secte initiatique « Nzobi » veut aider Sassou à lutter contre les antivaleurs

Congo : la secte initiatique « Nzobi » veut aider Sassou à lutter contre les antivaleurs

Congo

Au Congo, des tenants de la secte initiatique « Nzobi » se proposent de s’associer aux institutions de l’Etat pour mettre hors d‘état de nuire des fonctionnaires ou citoyens impliqués dans des scandales liés à la gestion de la chose publique.

Aussi absurde que cela puisse paraître, quelque loufoque que soit l’initiative….Et pourtant, c’est vrai. Selon Le Patriote, un hebdomadaire congolais que des observateurs jugent proche du régime de Sassou-Nguesso, la proposition aurait été faite par des membres du « Nzobi ».

Depuis la nuit des temps, la vie des sociétés téké, kota, nzebi, mbeti, etc. aussi bien du Congo que du Gabon, est rythmée par le Nzobi. C’est un tribunal différent des autres juridictions traditionnelles africaines, en ce qu’il n’est basé que sur le mysticisme et donc l’irrationnel ou le métaphysique. Il doit aussi sa singularité et sa réputation à son « objectivité », son « incorruptibilité » et son « implacabilité ».

De quoi surmonter les limites du droit positif introduit par les Occidentaux. Et si le Congo abrite en son sein un instrument de détection des coupables aussi efficace que puissant, le pays fait aussi partie des Nations africaines dont le développement est retardé par des pratiques peu amènes comme la gabegie, la corruption, le détournement des deniers publics, la concussion et la fraude.

Des pratiques que Sassou-Nguesso avait promis de combattre en 2009 au lendemain de sa réélection pour un deuxième et dernier mandat selon la Constitution de 2002. Mais, le Chef de l’Etat congolais semble avoir prêché dans le désert, puisqu’aucun changement n’a été observé. Ce, jusqu’en 2016 pendant sa réélection très contestée suite à la suppression de la Constitution de 2002 pour permettre au Président Sassou « de continuer de garantir la paix et la stabilité et poursuivre son ambitieux programme de développement inclusif du Congo ».

En prêtant serment en 2016, Sassou avait appelé à la rupture avec les anciennes mentalités basées sur les antivaleurs. Malheureusement, aucun de ses ministres ou responsables d’institutions n’a daigné l‘écouter. Et l’opinion publique a même tourné en dérision le vocable « rupture » pour l’assimiler à la crise économique et financière qui frappe le pays depuis 2014 du fait de la chute des cours des matières premières dont le pétrole.

Les institutions classiques dépassées par l’impunité presque légitimée ou légalisée ?

Dès lors, face à la persistance de ces antivaleurs, les membres du Nzobi s’engagent à offrir leurs « bons offices » au Chef de l’Etat congolais. En passant devant la barre « nzobiste », chaque responsable ou ministre devrait faire un serment comme à la justice (je jure de dire toute la vérité). Comme dans l’ancien temps, le coupable est sévèrement puni : maladie incurable, mort subite et autres sorts. Bien entendu, d’après des Nzobistes, le Nzobi accorde aussi des circonstances atténuantes au cas où le coupable passe aux aveux avant de se présenter devant le dieu de la justice. C’est donc à ce genre d‘épreuve que devraient désormais être soumis des dignitaires du régime de Sassou-Nguesso.

Au cas où le président de la République et ses collaborateurs rejettent la proposition, préviennent les nzobistes, « ils agiront discrètement en minant par exemple les rond-points », rapporte Le Patriote. « Tant pis pour les contrevenants », martèle l’hebdomadaire.

Mais, comment vérifier l’efficience ou l’impartialité d’un tel tribunal dans une société congolaise marquée par une forte diversité culturelle et coutumière ? Comment par exemple pourrait-on faire appliquer le Nzobi à un Bakugni, un Batsangui, un Bakamba ou un Bakouelé, lorsqu’on sait que ces ethnies et bien d’autres, selon des sources concordantes, ne connaissent pas le Nzobi ? Est-ce un épouvantail que l’Etat congolais voudrait utiliser à des fins dissuasives étant donné que les institutions classiques (justice par exemple) semblent avoir montré leurs limites ?

Ça peut être possible. Si l’on s’en tient aux dires du constitutionnaliste congolais le Professeur Placide Moudoudou qui disait en 2015 sur RFI que le Congolais a plus peur du Nzobi que de la justice ou de la prison. Bref comment dans ce cas-là, concilier avec efficacité, tradition et modernité ? Quelle formule utiliser pour que l’irrationnel agisse en symbiose avec le rationnel ? Est-ce une manière aguichante de convaincre des partenaires dont le Fonds monétaire international (FMI) des efforts fournis par le Gouvernement pour réunir les conditions d’une bonne gouvernance ?

Beaucoup de questions auxquelles les institutions congolaises devraient au préalable répondre avant de rejeter ou non l’offre des Nzobistes.

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