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L'activiste Sophie Kanza lutte contre la xénophobie entre Africains

L'activiste Sophie Kanza lutte contre la xénophobie entre Africains

Racisme

Alors que les frontières physiques commencent à disparaître avec la suppression des visas dans certains pays Africains, les frontières mentales, elles, subsistent dans l’esprit de certains.

L’activiste Sophie Kanza est à l’origine d’un court-métrage qui traite d’un sujet dont on ne parle pas assez, il s’agit de la xénophobie (c’est-à-dire la haine de l‘étranger) qui existe parfois entre Africains. Il s’appelle « We are Human », et a remporté le prix au festival de cinéma Plural + sponsorisé par l’ONU.

Vous avez créé une fondation avec votre soeur pour combattre la xénophobie. Pouvez-vous nous en parler?

Souvent, quand les immigrés africains viennent en Afrique du Sud, ils restent entre eux parce qu’ils ont entendu parler de xénophobie. Les Congolais restent entre Congolais, les Zambiens n’interagissent qu’avec des Zambiens, etc. C’est une forme d’exclusion sociale. Notre fondation leur permet de sortir de leur zone de confort et d’interagir avec tout le monde.

Avez-vous subi des discriminations en Afrique du Sud ?

Ma sœur et moi sommes arrivées en Afrique du Sud lorsque nous avions deux et trois. En tant qu’immigrées africaines, nous étions souvent victimes de discrimination. Il y a une culture en Afrique du Sud selon laquelle les immigrés n’ont pas leur place et devraient tous rentrer chez eux, car tout ce qu’ils font, c’est profiter des ressources et voler des emplois. Les Sud-Africains ont très peu conscience de ce que vivent les migrants et les réfugiés dans ce pays. Ils pensent que nous profitons des aides du gouvernement et d’autres choses de ce genre, ce qui est inexact.

Il y a un certain nombre de stéréotypes associés au fait d‘être un immigré africain en Afrique du Sud. Il y a beaucoup de violence de la part des Sud-Africains Noirs envers les immigrés Africains, mais ils ne traitent pas les Européens ou les Américains de cette façon.

Quand nous étions jeunes et que nous subissions cela, nous ne disions pas grand-chose. Oui, ça fait mal, mais on laisse tomber. Mais en vieillissant, ça a empiré. Et quand nous avons eu cette plate-forme, nous avons décidé que nous devions dire quelque chose.

Parce que beaucoup d’entre nous faisons partie d’une génération confuse. Par exemple moi, je suis trop Congolaise pour être Sud-africaine et trop Sud-africaine pour être Congolaise. Je suis arrivée ici quand j‘étais petite, donc je n’ai pas eu le choix. Beaucoup d’entre nous n’ont pas le sentiment d’appartenir à un endroit précis. Donc, avec ce projet, nous voulions simplement donner une voix à ces migrants.

Au lieu de nous voir comme des frères et sœurs, les Sud-Africains nous considèrent comme des menaces. Ils savent que notre éthique de travail et notre soif de réussite sont très élevés à cause des réalités de nos pays d’origine. Donc, c’est assez difficile parce que beaucoup d’immigrés accepteront un emploi même s’ils sont sous-payés, parce qu’ils n’ont rien d’autre. Quand vous venez ici sans rien, vous prenez ce qu’on vous donne.

Qu’est-ce qui pourrait aider à lutter contre la xénophobie entre Africains, qui est un phénomène qui n’existe pas qu’en Afrique du Sud ?

Je pense que tout commence par l‘éducation. Par exemple, beaucoup de Sud-Africains ne connaissent pas du tout l’histoire africaine. À l‘école, pas un jour, on ne parle de l’histoire africaine. Vous n’entendez jamais parler de Sankara, Lumumba, etc. C’est seulement au niveau universitaire que vous avez des cours d’histoire africaine. Mais quel est le pourcentage de la population qui va à l’université ?

Nous devons être éduqués et ouverts. Et il faudrait plus de campagnes de sensibilisation qui abordent ce thème, comme nous l’avons fait avec «We are human». C’est la toute première campagne où de véritables immigrés africains parlent de leurs expériences. Ce sont toujours d’autres personnes qui parlent en notre nom. Nous ne sommes pas représentés surtout en tant que jeunes. Changer l’esprit et la conception de la jeunesse est important, car elle a la capacité de changer le futur.

De nombreux pays africains ont adopté une politique de visa gratuite pour les ressortissants africains. Quelle est votre opinion là-dessus ?

Je pense que la suppression des visas est incroyable parce que voyager nous permet de nous ouvrir. Neuf fois sur dix, vous rencontrez des Sud-Africains qui n’ont jamais quitté l’Afrique du Sud, mais qui détestent les Nigérians à cause des personnes avec lesquelles ils ont interagi.

Nous devons voyager sur notre continent et encourager les voyages sur le continent. Tout le monde veut aller en Europe, mais il n’y a pas de campagne de masse qui encourage les voyages et l’interconnexion sur le continent africain.

Mais cette politique de suppression de visas n’est pas prête d’arriver ici en Afrique du Sud. Le système d’immigration est ridicule. Ils continuent de mettre en place de nouvelles lois institutionnalisant la xénophobie. Obtenir un visa sud-africain est devenu extrêmement difficile pour les ressortissants africains.

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