Afrique du Sud : le procureur de l'affaire Pistorius démissionne

Le procureur sud-africain Gerrie Nel, mondialement connu pour avoir obtenu la condamnation pour meurtre du champion paralympique Oscar Pistorius, a quitté ses fonctions et entamé une carrière d’enquêteur privé pour une ONG afrikaner.

Magistrat depuis trente-cinq ans, M. Nel a présenté sa démission dans un courrier adressé au parquet général du pays (NPA), a indiqué à l’AFP un de ses porte-parole, Luvuyo Mfaku.

“Il a justifié sa décision par la recherche d’autres centres d’intérêt”, a poursuivi M. Mfaku. “Nous lui souhaitons bonne chance dans ses nouvelles occupations”.

Surnommé le “bouledogue” ou le “pitbull”, Gerrie Nel s’est illustré devant les caméras du monde entier en portant les accusations de meurtre contre Oscar Pistorius pendant le procès à grand spectacle de l’athlète paralympique.

En avril 2014, il avait malmené l’accusé pendant cinq jours en le pressant de reconnaître avoir délibérément tué sa compagne, Reeva Steenkamp, à l’aube de la Saint-Valentin 2013.

“Vous avez tué une personne, c’est ce que vous avez fait ! Vous avez fait feu et vous l’avez tuée, allez-vous en prendre la responsabilité ?”, lui avait-il crié au visage.

Ses interrogatoires ont été si serrés qu’ils ont valu au procureur Nel une plainte, finalement rejetée, auprès de la Commission des droits de l’Homme et de nombreux rappels à l’ordre de la juge Thokozile Masipa qui a dirigé le procès.

Condamné en première instance en 2014 à cinq ans de prison pour homicide involontaire, Oscar Pistorius, 30 ans, a finalement écopé en appel en juillet de six ans de réclusion pour meurtre.

La saga judiciaire qui porte son nom n’est toutefois pas terminée puisque le parquet a fait appel de ce verdict, dénoncé par Gerrie Nel lui-même comme trop clément.

L’ex-procureur a confirmé sa démission devant la presse et annoncé son recrutement par AfriForum, un groupe de pression proche de la minorité blanche du pays, pour lequel il va diriger des enquêtes. “Je pense que c’est une excellente nouvelle idée, je pense aussi que c’est totalement nécessaire”.

“AfriForum financera ces enquêtes. Nous visons très haut. Nous allons nous attaquer à des personnalités qui font la une des médias”.

Interrogé sur une éventuelle action contre le président Jacob Zuma, le président de l’ONG Kallie Kriel s’est contenté de répondre : “Personne n’est au-dessus des lois”.

Au pouvoir depuis 2009, M. Zuma est englué dans une série de scandales de corruption qui causent des remous jusqu’au sein de son propre parti, le Congrès national africain (ANC).

Le parquet général est régulièrement épinglé dans les médias pour sa proximité avec le clan Zuma.

Avant l’affaire Pistorius, M. Nel s‘était fait un nom en faisant emprisonner en 2010 l’ancien chef de la police sud-africaine et ex-patron d’Interpol Jackie Selebi pour corruption.

La traque de M. Selebi – qui bénéficiait d’importants appuis politiques – lui a valu un prix de l’Association internationale des procureurs, et de farouches inimitiés.

Un groupe de policiers armés l’avait ainsi arrêté devant sa famille en 2008, l’accusant de fraude, parjure et obstruction de la justice, des charges finalement abandonnées.

La départ de Gerrie Nel a suscité une avalanche de réactions sur les réseaux sociaux, certains accusant l’organisation d‘être “syndicat de Blancs” voire “raciste”.

AFP