Burkina Faso
Le Burkina Faso tourne le dos au coton transgénique après s‘être lancé dans l’agriculture biotechnologique au début des années 2000.
Considéré comme un laboratoire continental du coton transgénique, le Burkina a finalement jeté l‘éponge la semaine dernière, du moins provisoirement. Les autorités de ce pays d’Afrique de l’Ouest estiment que le coton génétiquement modifié (CGM) n’est plus rentable. “La fibre de coton que nous produisons aujourd’hui est devenue courte”, et donc plus difficile à filer, a indiqué le président burkinabé Roch Marc Christian Kaboré. Ce qui, aux yeux du chef de l‘État burkinabé, “signifie que, sur le marché, c’est une activité qui n’est plus très intéressante”.
Le coton était le principal produit d’exportation et première source de devises du Burkina Faso depuis la colonisation, avant d‘être détrôné en 2009 par l’or. Sur 19 millions de Burkinabés, environ 4 millions vivent directement ou indirectement de l’“or blanc”. Wilfried Yaméogo, directeur de la principale société cotonnière du pays, la Sofitex, a confirmé le 5 avril que l’Association interprofessionnelle du coton du Burkina (AICB) a décidé d’aller “vers le 100% conventionnel”. “C’est une bataille de gagnée”, s’est félicité Christian Legay du Conseil national de l’agroalimentaire biologique, qui regroupe des associations de consommateurs et d’agriculteurs et milite pour un moratoire de 5-10 ans sur les OGM au Burkina.
Toutefois, ce sont des raisons de rentabilité qui ont poussé les autorités du pays à renoncer à cette activité. Autrefois très apprécié sur le marché mondial pour sa pureté et la longueur de sa fibre, le coton burkinabé est tombé en déclin au fil des années. Cette chute lui a fait perdre son label, entraînant des pertes évaluées à 48,3 milliards de francs CFA (70 millions d’euros) pour la période 2011-2016. Il y a quinze ans, le coton CGM avait généré d’immenses espoirs. On parlait alors de résistance à la sécheresse dans ce pays sahélien et d‘éradication des parasites, notamment des chenilles “hélicoverpa armigera” qui ont ruiné des milliers de paysans en 1991, 1996 et 2000.
Une réduction du nombre de traitements phytosanitaires (pesticides) et de meilleurs rendements étaient promis, avec une augmentation de 50 % à 90 % de la production. En 2003, le Burkina avait accordé des autorisations d’expérimentation à Monsanto et à la multinationale suisse Syngenta. En 2007, le pays a lancé la production à grande échelle du coton transgénique et, à partir de 2009, les autorités ont ordonné aux paysans d’en ensemencer jusqu‘à 80 % de leur production, permettant une réduction du temps et de la pénibilité au travail. “Avec le coton CGM, on a deux traitements, avec le conventionnel on en a six. Les traitements, ça fatigue”, témoigne Célestin Dala, cotonculteur dans le Nayala (Ouest).
Le président burkinabé a toutefois confié à l’AFP que le pays “poursuivait les discussions avec Monsanto”. Certains espèrent des dédommagements du géant américain qui parie sur une nouvelle variété de coton biotechnologique pour la campagne 2020-2021. Selon les experts, “les inquiétudes se situent au niveau des expérimentations en cours sur les céréales, notamment le maïs, le sorgho et le nimbé, avec Monsanto”. La renonciation du Burkina au CGM est un “bon avertissement pour les autres pays d’Afrique qui étaient tentés ou incités par le gouvernement américain et courtisés par les firmes d’agrobusiness”.
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